Si un vrombissement persistant perturbe votre sieste ou votre randonnée, regardez bien avant d’appeler les pompiers: il ne s’agit peut-être pas d’un nid de guêpes, mais, plus vraisemblablement, d’un drone. Ces engins munis de plusieurs petites hélices et pilotés à distance, qui doivent leur nom au faux-bourdon anglais, volent désormais par milliers dans le ciel suisse. S’il suffit d’un clic pour les acheter, leur pilotage requiert un peu d’adresse et quelques connaissances légales.
Permis de voler
Les multicoptères de moins de 30 kilos ne nécessitent pas d’autorisation. La législation suisse est très souple dans ce domaine et ne fait pas encore de différence entre les modèles réduits et les appareils équipés d’une caméra. Les drones doivent toutefois respecter quelques règles de base.
⇨ Il est interdit de survoler un attroupement de plus de 24 personnes.
⇨ Il est interdit d’approcher à moins de 5 km des pistes d’un terrain d’aviation.
⇨ Il est déconseillé de voler plus haut que 150 m, au risque de se retrouver nez à nez avec un avion.
⇨ On doit toujours garder un contact visuel avec l’appareil. Si on chausse des lunettes à réalité virtuelle, il faut être accompagné d’un copilote qui peut prendre la relève en tout temps si nécessaire, ou demander
⇨ S’il n’y a pas de limite d’âge pour piloter un drone, les cours s’adressent généralement aux 14 ans et plus. On ne devrait pas confier ce genre d’appareil à des enfants sans surveillance, car ils pourraient se blesser.
⇨ L’OFAC met en ligne une carte interactive des zones prohibées*. Certaines localités (Genève, Lausanne, Yverdon-les-Bains) interdisent ainsi le survol de leur territoire: mieux vaut donc se renseigner avant de décoller. Idem si l’on passe la frontière: en France et dans la majorité des pays europeéns, il est en effet interdit de survoler les zones habitées.
Vol assuré
En cas de chute, l’appareil peut causer des dégâts considérables. Les appareils de moins de 500 g sont couverts par la RC liée à l’assurance ménage. Au-delà de cette limite, il faut impérativement conclure une police RC couvrant les lésions corporelles et les dégâts à hauteur d’un million de francs au moins.
Les modalités d’assurance varient selon les compagnies. Dans tous les cas, on vérifiera que l’appareil soit couvert en concluant, si nécessaire, un complément d’assurance. Zurich et la Mobilière prennent ainsi en charge les dégâts dans la RC de base, alors que Vaudoise et AXA exigent une couverture complémentaire. Cette option coûte 31 fr. chez AXA. Dans tous les cas, on portera, sur soi, l’attestation de la RC pour faire voler l’appareil.
Si l’on prête son drone, on veillera également à ce que l’utilisateur soit suffisamment expérimenté et qu’il soit aussi couvert par une RC. Le médiateur de l’assurance privée donne ainsi l’exemple d’un pilote qui avait prêté un engin professionnel à un ami et s’est absenté brièvement. Ce dernier a alors perdu le contrôle de l’engin qui s’est écrasé. L’assurance RC du fautif n’a remboursé que les deux tiers de la réparation devisée à 8127 fr., estimant que le propriétaire n’avait pas à laisser un multicoptère d’une telle valeur à un profane.
Cachez ce balcon
On ne peut pas filmer une personne sans son consentement, même en la survolant à son insu. Dans ce domaine, c’est la loi sur la protection des données qui prévaut. Voilà pour la théorie. Dans les faits, la loi est encore floue quant aux limites à ne pas franchir: aucune règle ne précise ainsi la hauteur minimale à respecter dans un quartier habité dans les zones où le vol est autorisé. Si un voisin devient trop indiscret, l’OFAC recommande cependant
de chercher le dialogue avant d’essayer d’abattre l’engin en plein vol…
Hélices sous contrôle
Il n’est pas obligatoire, en Suisse, de suivre une formation pour piloter un drone. Plusieurs écoles* proposent toutefois des cours d’une journée avec une base théorique et des exercices pratiques pour acquérir quelques réflexes. Compter entre 190 fr. et 300 fr. selon les prestations fournies (repas, support de cours, drones en double commande). Il est en effet très utile de connaître les bases légales et les dangers à éviter ainsi que de savoir piloter l’engin même quand le GPS tombe en panne. Quant aux hélices, elles sont très coupantes et il faut apprendre à les manipuler sans risquer de se blesser.
Drôle d’oiseau
Les drones évoluent dans l’espace aérien inférieur, là où les oiseaux régnaient jusqu’ici en maîtres. Or, plus un drone est grand et bruyant, plus il risque d’effaroucher les volatiles. Dans les zones de nidifications, ces incursions ont des conséquences dramatiques pour les espèces. La station ornithologique de Sempach recommande en outre de ne pas décoller ni d’atterrir ou de voler près d’un oiseau. On renoncera aux vols le long des parois rocheuses, particulièrement de février à juillet, soit pendant la période de nidification d’espèces sensibles.
Il est enfin interdit de survoler ou d’approcher à moins de 200 m des réserves d’oiseaux d’eau et de migrateurs.
Le juste prix
Les appareils trop sommaires sont malaisés à piloter: compter plusieurs centaines de francs pour un engin vraiment utilisable. Frédéric Gex, instructeur à l’Ecole suisse du drone, conseille d’opter pour un modèle équipé d’un stabilisateur qui restera immobile si on ne touche rien. Sans ce dispositif, il faut sans cesse maintenir l’appareil en position, et il sera difficile de prendre des photos nettes. L’option «retour à la base» évite en outre de perdre l’engin: selon l’état de la batterie, ce dernier rejoint son point de départ à temps pour ne pas s’écraser dans les champs.
Claire Houriet Rime
Lire le bonus web: Drôles de drones