Andreas Meyer a le sourire. Avec plus de 1 million de salaire annuel, le directeur des CFF a gagné en 2011 plus du double qu’un conseiller fédéral (environ 475 000 fr.). Les dirigeants de La Poste et de Swisscom ne sont pas en reste, eux aussi habitués à recevoir des chèques qui flirtent avec les sept chiffres.
Il n’en a pourtant pas toujours été ainsi. En 1996, l’ancien chef des CFF, Benedikt Weibel, réussissait sans peine à joindre les deux bouts avec un salaire annuel de 300 000 fr., soit trois fois moins que son homologue aujourd’hui. La progression salariale a suivi le même chemin à La Poste et à Swisscom.
La Poste: salaire multiplié par trois
Jürg Bucher, actuel dirigeant de La Poste, a ainsi encaissé quelque 924 501 fr. pour l’année 2011. Comparés aux 323 438 fr. que touchait en 1996 Dieter Syz, l’ancien directeur général des PTT, cela représente une augmentation salariale de 186% en 15 ans. Une bagatelle toutefois en regard des 1 570 000 fr. du chef de Swisscom, Carsten Schloter, qui touche, lui, presque cinq fois plus que son prédécesseur de 1996. Dans son cas, la progression atteint 385%.
Les employés placés sous leurs ordres n’ont pas eu autant de chance. Aux CFF, les salaires du personnel de guichet, des agents de train et des monteurs de voie ont progressé d’un petit 9%, pendant la même période (voir tableau). Pas même de quoi compenser le renchérissement de 12,5%. Entre le salaire le plus bas de l’entreprise et le plus élevé, le rapport est de 1 à 25. Autrement dit, l’employé le plus modeste devrait travailler pendant 25 ans pour toucher le salaire qu’Andreas Meyer perçoit en une année…
Ecarts de 1 à 25
A La Poste, les chiffres antérieurs à 2001 ne sont pas disponibles, mais on peut supposer que les salaires ont évolué à un rythme similaire. Un assistant technicien de Swisscom touchait, par exemple, 74 750 fr. en 2011, ce qui correspond à une progression d’environ 15% depuis 1996.
Idem pour les facteurs. Selon le syndicat Syndicom, en 2011, le salaire de base pour la catégorie «offrant de bonnes prestations, sans qualification utile à la fonction» s’établissait à 59 771 fr., 15% de plus qu’en 1996. Pour leur part, un conducteur de car postal et un employé de guichet se contentaient de 65 673 fr. en 2011, à peine 6% de plus que 15 ans auparavant. A La Poste, l’écart salarial atteint aujourd’hui 1/21. Pour Swisscom, le fossé, pour ne pas dire l’abîme, est même de 1/35.
Des salaires qui choquent
La question des salaires exorbitants des dirigeants du service public (y compris les membres des conseils d’administration) a été plus d’une fois soulevée au niveau parlementaire. Un sondage que nous avons commandité à l’Institut GfK révèle également que 76,6% des personnes interrogées sont indignées par ces salaires (lire «La Poste et les CFF sous la loupe des usagers», BàS 3/2012). De manière constante, le Conseil fédéral répond aux critiques en invoquant la «situation du marché de l’emploi». Traduction: si on veut des dirigeants de haut niveau, il faut s’aligner sur les salaires du privé.
Au moins un de ces «superdirigeants» leur a tout de même donné tort: Benedikt Weibel, patron des CFF pendant 14 ans. En 1999, lorsque l’entreprise s’est muée en société anonyme de droit public, le président du conseil d’administration de l’époque avait proposé de doubler le salaire du patron des CFF, pour le faire passer de 380 000 fr. à 720 000 fr. L’intéressé avait refusé, plafonnant sa rémunération à un maximum de 600 000 fr. Face à la presse, il avait alors expliqué que de tels niveaux salariaux le mettaient mal à l’aise. Force est de constater que son exemple n’a pas été suivi depuis…
Gery Schwager / phc
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