Loin d’être égales pour tous, les chances d’accès aux bancs de la fac dépendent avant tout du milieu dont on est issu et du soutien de la famille, puisqu'elle participe – en moyenne – à 56% des ressources de l’étudiant. Mais, si «modestes» fussent-ils, les frais prélevés par chacune des hautes écoles universitaires et des Ecoles polytechniques fédérales (EPF) augmentent encore ces disparités.
Les «taxes semestrielles» sont, en effet, fixées par les cantons, à part les EPF qui sont sous le contrôle de la Confédération. Sur une année, elles s’échelonnent entre 1000 fr. à Genève et 1310 fr. à Fribourg, un peu plus pour les étrangers (voir tableau). A ces frais de base, il faut toutefois souvent ajouter des coûts qui n’apparaissent pas toujours sur les sites officiels. L’Université de Lausanne prélève, par exemple, une taxe administrative unique de 200 fr. lorsqu’il faut établir une équivalence pour un diplôme d’entrée non délivré en Suisse (tel le bac), tandis que l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne demande 150 fr. pour la même prestation et Genève 65 fr.
Fribourg se distingue
Fribourg est un cas à part, au sens où chaque faculté encaisse, en plus, des «frais d’examens». Inutile de chercher sur unifr.ch, les chiffres n’y figurent pas! Le problème ne date pas d’hier: «L’Université de Fribourg examine des pistes pour simplifier l’encaissement des taxes d’examen», répète son secrétaire général, Daniel Schoenmann depuis 2009. Mais, pour l’heure, les différences restent abyssales… Un étudiant en théologie ne débourse que 250 fr. s’il parvient au master sans encombre, mais la facture grimpe à 380 fr. pour un lettreux (bachelor + master), 540 fr. pour l’étudiant en sciences et jusqu’à 900 fr. pour celui en sciences économiques et sociales et même 1140 fr. pour les futurs avocats.
Le coût d’entrée aux université romandes demeure toutefois modeste comparé aux 4000 fr. annuels (et 8000 fr. pour les étrangers) exigés par l’Université de la Suisse italienne, basée à Lugano et à Mendrisio.
Le climat se gâte
Sur le plan international aussi, la Suisse figure dans la fourchette basse. Rien à voir avec les Etats-Unis où les étudiants amoncellent des dettes pour plusieurs dizaines de milliers de francs au cours de leur cursus universitaire. Ou avec les Anglais, qui ont vu leurs émoluments tripler à la rentrée de 2012, jusqu’à atteindre 9000 livres (près de 14 000 fr.), poussant les «fee refugees» (littéralement, réfugiés des taxes) à émigrer vers l’Ecosse ou l’Irlande.
Globalement, l’EPFL estime que le coût de la vie d’un étudiant lausannois revient à 22 000 fr. par an, les taxes universitaires représentant 6%. Le climat tend cependant à se gâter. Depuis plusieurs années, des voix se font toujours plus insistantes pour relever les taxes, afin de faire face à l’augmentation des coûts assumés à environ 80% par les cantons. Les associations d’étudiants protestent en soulignant qu’elles ne représentent que 2% des revenus académiques et risquent de décourager encore davantage les candidats modestes.
Il n’empêche: en Suisse alémanique, la hausse est déjà bien amorcée. Berne, Zurich et Saint–Gall ont récemment relevé leurs taxes et les Ecoles polytechniques fédérales (Zurich et Lausanne) sont impatientes de leur emboîter le pas. Pour tenter d’enrayer le mouvement, le socialiste Mathias Reynard a déposé, en mars dernier, une initiative parlementaire fédérale. Sans se faire beaucoup d’illusions, il espère tout au moins susciter le débat sur un sujet qui passionne peu les parlementaires.
Philippe Chevalier
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