Voici – enfin! – un jugement démontrant que les consommateurs ne doivent pas tout accepter des assureurs et veiller à défendre leurs droits.
Rappel des faits: en décembre 2011, en toute discrétion, la caisse maladie Supra a envoyé à ses assurés au bénéfice d’une complémentaire d’hospitalisation une liste très restrictive des établissements où ils pourraient se faire soigner, limitant, dans la foulée, le libre choix du médecin. Or, jusque-là, ces assurés avaient la garantie d’être hospitalisés dans tous les établissements publics ou privés, sans aucune restriction.
La rédaction de Bon à Savoir a été immédiatement contactée par de nombreux lecteurs désemparés. L’ombudsman de l’assurance maladie a, de son côté, tenté par trois fois de faire revenir Supra sur sa décision. Sans succès. Il n’y avait donc qu’une action en justice pour changer la donne. C’est ce que nous avons fait en mandatant l’avocat lausannois Gilles-Antoine Hofstetter. Après avoir auditionné de nombreux assurés qui nous avaient interpellés, nous avons retenu le cas de René Schaefer, représentatif de l’injustice subie par la majorité des ex-clients de Supra. Peu après, Assista, l’assurance de protection juridique de notre lecteur, nous rejoignait.
Après de multiples rebondissement, le 4 janvier 2013, le Tribunal d’arrondissement de Lausanne a admis le bien-fondé de notre plainte. Une décision primordiale, même si la Finma a, un mois avant, imposé la faillite de Supra SA assurances complémentaires. Cette décision est amplement justifiée, puisque les produits de remplacement proposés par Assura ont été calqués sur les contrats restrictifs et contestés.
Double impact
L’incidence de ce jugement, bien que soumis à un droit de recours avant d’entrer en force, est double.
- Les ex-assurés de Supra peuvent demander à Assura de leur proposer un produit d’assurance – existant ou à créer – qui ne soit pas limitatif. Et cela sans surclassement, mais en tant que proposition initiale (lire encadré).
- Ceux dont les prestations ont été refusées par Supra tout au long de l’année 2012 peuvent s’appuyer sur ce jugement pour obtenir la prise en charge rétroactive des frais par Assura, même s’ils ont volontairement résilié leur contrat.
Afin d’accompagner nos lecteurs dans leurs démarches, nous avons mis en ligne deux lettres types, à retrouver sur www.bonasavoir.ch/supra
Zeynep Ersan Berdoz
DÉCODAGE
Le diable se cache dans les détails
A la suite de la mise en faillite de Supra, la Finma a contraint Assura à reprendre les quelque 70 000 assurés dans son giron. Cette dernière doit leur proposer des prestations qui soient «aussi proches que possible de celles qui leur étaient offertes jusque-là», avec une prime désormais calculée sur l’âge réel de l’assuré et non plus sur son âge d’entrée. Rappelons que c’est ce modèle qui a conduit Supra à sa perte.
Afin d’atténuer l’impact financier sur les assurés, la Finma a exigé qu’un rabais ponctuel leur soit accordé. Il a été fixé à 60% de la hausse de la prime, sur une durée de quatre ans.
En décembre dernier, Assura proposait à René Schaefer, comme à de nombreux autres ex-détenteurs du produit Maxi, un contrat Optima Plus Varia, limité à une liste hospitalière restreinte, calqué sur le contrat contesté devant la justice. Assura lui laissait cependant la possibilité d’opter pour un produit Ultra, non restrictif, avec une adaptation à la hausse de sa prime.
Or, invoquant des «limitations techniques actuellement en cours de résolution», l’assureur n’était alors pas en mesure de communiquer les conditions de la nouvelle proposition exclusivement par téléphone. Il fallait donc traquer l’information sur son site, ou sur celui de la Finma, pour réaliser que le rabais restait plafonné à 60% de la prime initiale et n’était pas recalculé en fonction de la prime du nouveau produit.
D’où l’importance, encore aujourd’hui, de ne pas céder à une proposition de surclassement faite par l’assureur, mais d’exiger une nouvelle offre à titre de proposition initiale, ce qu’indique précisément notre lettre type.