Fentanyl, oxycodone ou encore tramadol. Connus sous le nom d’opioïdes, ces médicaments sont en général utilisés pour soulager la douleur après un accident ou une chirurgie, ou encore en cas de douleurs chroniques. Les médecins y ont donc largement recours. Or, un usage prolongé peut entraîner une forte dépendance chez l’adulte. Et chez l’enfant, les risques sont encore pires: un surdosage peut s’avérer fatal.
Selon une étude de l’Université de Genève, le tramadol se révèle particulièrement dangereux. Son administration aurait entraîné la mort de 15 enfants et adolescents, âgés de quelques mois à 17 ans. Ils avaient tous reçu du tramadol et seraient décédés à la suite d’un arrêt respiratoire. La faute à un surdosage. Une surdose de tramadol se manifeste par des vomissements, des troubles de la conscience, des convulsions et, dans les cas les plus graves, une difficulté respiratoire qui peut provoquer un arrêt respiratoire.
Risque de surdosage
Le problème, c’est qu’il n’est pas toujours aisé d’éviter un tel surdosage. Celui-ci peut être dû à une erreur de prescription. Mais il arrive aussi qu’il découle du fait que le patient soit un «métaboliseur ultra-rapide». Autrement dit, son métabolisme transforme si rapidement la substance que cela entraîne les mêmes effets qu’un surdosage. Le risque de passer à côté d’une telle éventualité est particulièrement grand dans le cadre d’opérations ambulatoires, où le personnel hospitalier ne peut pas surveiller en permanence les patients. Voilà pourquoi il est largement recommandé de privilégier les antalgiques sans tramadol.
Médecin et rédacteur en chef du magazine Pharma-Kritik, Etzel Gysling privilégie pour sa part des analgésiques tels que l’ibuprofène. Il lui arrive toutefois d’administrer de la morphine en cas de douleurs extrêmement intenses. Il reconnaît qu’il s’agit d’un opioïde, mais assure qu’il peut être dosé de manière sûre. Selon lui, les enfants qui reçoivent des opioïdes devraient de toute manière toujours être bien surveillés, de sorte à éviter toute conséquence fatale. Il rappelle les signaux d’alarme d’une prise en charge médicale d’urgence: confusion, somnolence, vomissements ou encore problèmes respiratoires.
Afin d’éviter tout risque, certains sont prêts à aller plus loin. A l’image du rédacteur en chef du magazine allemand Arznei Telegramm, Wolfgang Becker-Brüser, qui a demandé aux autorités européennes d’interdire toute administration de tramadol aux enfants et adolescents.
Qu’en pense Grünenthal, la firme allemande qui a développé le fameux antalgique? Elle soutient que le tramadol reste «nécessaire et sensé». Pour ce qui est des décès survenus à la suite d’un arrêt respiratoire, elle reporte la faute sur les autres antalgiques que les victimes auraient reçus à côté du tramadol. Elle cite plusieurs études à ce sujet. Menées auprès de plus de 2000 enfants, celles-ci auraient démontré l’innocuité du tramadol, qui n’aurait que «des effets minimes» sur la respiration. Seul hic, une partie des recherches en question a été financée par Grünenthal elle-même.
Andreas Gossweiler / sh