Un enfant sur dix souffre d’asthme en Suisse. C’est la maladie chronique la plus répandue de notre société, et pourtant, de nombreux parents se sentent impuissants face à la crise. Car les symptômes ne sont pas rassurants (lire encadré «Une réaction exagérée»): quand les bronches se contractent, quand l’air se raréfie et que la respiration devient sifflante, il y a de quoi perdre son sang-froid.
«Mieux le malade et son entourage comprennent ce qui arrive, mieux ils pourront agir. Il ne sera alors pas forcément nécessaire de courir chez le médecin», explique Anne Stoky Hess, intervenante à l’école de l’asthme à l’Hôpital de l’Enfance à Lausanne (HEL). En Suisse romande, à l’initiative de la Ligue pulmonaire, les rencontres se multiplient pour enseigner les bons réflexes dès le plus jeune âge.
Pionnier dans ce domaine, l’HEL organise depuis 20 ans des cours pour les patients dès 4 ans et leurs parents. Le but de ces deux rencontres, gratuites, est d’expliquer la maladie (lire encadré «De Sion à La Chaux-de-Fonds») et de mettre des mots sur ce que vivent les patients. En comprenant le déroulement de la crise, on arrive à en reconnaître les signes avant-coureurs et à prendre les médicaments à temps. Ces compétences diminuent le stress du petit patient et de son entourage.
Identifier la crise
Les adultes sont accueillis par un médecin qui donne des bases théoriques. Ils apprennent ensuite le comportement à adopter: quelle position prendre pour dégager les bronches? Quels remèdes donner à l’enfant, et à quel moment? A partir de quand faut-il consulter un médecin, ou se rendre à l’hôpital? Comment poursuivre le traitement une fois la crise passée? Peut-on pratiquer un sport, et lequel?
Les participants passent ainsi en revue les médicaments, avec leurs effets primaires et secondaires, en dédramatisant par exemple l’absorption de cortisone. Ils apprennent aussi, de manière très pratique, comment fonctionnent les inhalateurs et comment aider l’enfant à prendre ses médicaments, mais aussi quelle est la partie du corps qui dysfonctionne, quels sont les effets de la maladie, et pourquoi certains enfants ont plus de risques de la développer que d’autres.
L’asthme infantile est très souvent lié à des allergies: en identifiant les facteurs déclencheurs, on peut aussi modifier l’environnement en conséquence: faut-il enlever le tapis de la chambre d’enfants, ou éloigner le chat quand on rend visite aux grands-parents? Comment préserver l’enfant de la fumée passive?
Marionnettes et jeux de rôles
Pendant ce temps, d’autres intervenants spécialisés (infirmiers, physiothérapeutes) prennent en charge les petits patients. Un tuyau en toile représente ainsi la bronche et les enfants passent à travers pour simuler l’air. Avec des marionnettes symbolisant la maladie et ses remèdes, avec une poupée à effeuiller pour localiser les poumons et les bronches dans le corps, ou encore par le biais de jeux de rôles, les enfants acquièrent les bons réflexes.
A la fin du cours, tout le monde se réunit et les enfants montrent à leurs parents ce qu’ils ont appris. C’est aussi l’occasion de partager son expérience avec d’autres familles concernées.
Le fait de verbaliser des situations de stress aigu et de réfléchir à la manière de les combattre donne aux familles les outils nécessaires pour affronter plus sereinement les prochains épisodes. «Grâce à ces cours, elles acquièrent de l’autonomie et peuvent vivre normalement. Il est prouvé que le nombre de consultations et d’hospitalisations diminue tout en améliorant la qualité de vie de toute la cellule familiale», relève Anne Stoky Hess.
Claire Houriet Rime
Lire le bonus web: apprivoiser l’asthme par le jeu
L’asthme, c’est quoi?
Une réaction exagérée
L’asthme est provoqué la plupart du temps par une allergie à certaines substances présentes dans l’air ambiant (pollens, poils d’animaux, acariens et spores de moisissures). Le stress, le froid, la pollution, les virus, la fumée passive ou l’effort physique sont quant à eux des facteurs irritants. Ils peuvent aussi déclencher une crise chez les patients qui ont des bronches réactives.
Sous l’effet de la réaction allergique, les bronches se contractent, s’enflamment et s’encombrent de mucus. Une respiration difficile et sifflante, une toux sèche et un sentiment d’oppression thoracique sont, notamment, des signes qui ne trompent pas.
Le traitement repose aujourd’hui sur trois piliers:
⇨ Eviter les allergènes (animaux domestiques, acariens, pollens, moisissures) et limiter l’exposition aux facteurs irritants.
⇨ Ouvrir les bronches. Les médicaments à effet rapide soulagent la crise.
⇨ Sur le long terme, empêcher l’inflammation avec un traitement à base de cortisone. Certains sprays combinent ces deux types de composants.
Les patients mènent aujourd’hui une vie quasi normale et choisissent librement leurs activités, même le sport. Lorsque l’asthme est correctement traité, les symptômes s’espacent et diminuent. Une partie des enfants dont la maladie est contrôlée ne présentera ainsi plus de troubles à la fin de l’adolescence.
L’asthme peut aussi survenir à l’âge adulte. Les causes sont alors multiples, car, outre les allergies, il peut être dû au tabac, à une infection, ou aux diverses substances rencontrées au travail (salon de coiffure, boulangerie, atelier de soudure) ou pendant les loisirs (peinture, photo). A la différence des enfants, les crises sont moins aiguës, mais le patient respire difficilement ou souffre d’une toux chronique.
Cours pour chacun
De Sion à La Chaux-de-Fonds
Tous les cours* se déroulent sur deux après-midis ou deux soirées, avec une prise en charge d’abord séparée des enfants et des parents, puis une mise en commun.
A Lausanne, les cours, gratuits, ont lieu six fois par an le mercredi après-midi. D’autres sessions sont organisées à Aigle et Yverdon par les hôpitaux de la place.
Ailleurs en Suisse romande, les sessions sont organisées sous la houlette de la Ligue pulmonaire, avec la collaboration de médecins et de thérapeutes.
A Sion, les rencontres se déroulent le lundi soir. Les frais d’inscription s’élèvent à 20 fr.
A Peseux et à la Chaux-de-Fonds, les familles se retrouvent le jeudi soir. La participation est facturée 20 fr. pour toute la famille. Des cours individuels sont également organisés sur demande et des moniteurs de natation sont formés aux spécificités des patients asthmatiques.
A Fribourg, la Ligue pulmonaire est en train de mettre sur pied, avec un pédiatre, un cours pour le mois d’avril. Ici aussi, la Ligue pulmonaire sensibilise des moniteurs de natation et d’aviron.
A Delémont, les malades peuvent s’inscrire à des cours individuels pris en charge par l’assurance de base.
Aucun cours n’est organisé pour l’heure à Genève ni dans le Jura bernois.
A noter que la Ligue pulmonaire a mis en ligne des brochures et une bande dessinée pour expliquer la maladie aux enfants. Des clips vidéo sont aussi en cours de traduction.