Rehausser le goût d’un risotto avec un cube de bouillon, c’est un réflexe aussi naturel que de saler l’eau des pâtes. En un clin d’œil, le mélange fait son effet en donnant l’illusion de cuisiner sainement: des vitamines et des protéines, ça ne peut pas faire de mal.
Et pourtant: la plupart des bouillons n’apportent aucune valeur nutritive. Au contraire: ils contiennent trop de sel et des additifs inutiles, voire problématiques. Certaines renferment encore du sucre, ou de l’huile de palme. «Il faut toujours lire attentivement la liste des composants avant d’acheter un produit», conseille l’experte en nutrition bâloise Carine Buhmann.
Un avis que ne contrediront pas les résultats de notre analyse. Nous avons passé au crible les étiquettes de douze bouillons tout prêts, en les soumettant ensuite à des experts, pour un résultat peu appétissant.
Viande et légumes
Premier constat: la viande et les légumes figurent en dose homéopathique dans la plupart des produits de notre sélection, même s’ils s’affichent sur la photo de l’emballage. Le bouillon de bœuf haut de gamme Fine Food de Coop ne contient ainsi que 4,5% de viande. Il fait un peu mieux que la poudre de M-Budget, qui affiche moins de 1% de légumes. «C’est beaucoup trop peu», dénonce la diététicienne bernoise Beatrice Fischer. Gagnant de notre test, le bocal de Alnatura arrive aussi en tête sur ce point avec près de 20% de légumes.
Trop de sel
Autre problème: ces préparations contiennent trop de sel. Le bouillon de bœuf Fine Food de Coop en affiche ainsi 3,3 g pour un bol de 2,5 dl, alors que la dose quotidienne d’un adulte ne devrait pas dépasser 6 g, aggravant ainsi son score.
L’abus de sel fait monter la pression artérielle et augmente le risque de maladies cardio-vasculaires. «Il faut doser ces mélanges avec modération et éviter de saler la nourriture après coup», rappelle Carine Buhmann. En 2013, le réseau international de recherche Cochrane était arrivé à la conclusion qu’on peut faire baisser la pression en diminuant la quantité de sel ingérée pendant quatre semaines. L’étude avait porté sur 3000 personnes.
Arômes artificiels
Les fabricants ne lésinent pas sur les substances chimiques pour compenser la faible concentration d’ingrédients naturels et donner du goût aux potages. Ils auraient tort de s’en priver, puisque ces additifs peuvent être qualifiés d’«arômes naturels» dans la liste des composants. «Ils n’ont rien de naturel», met pourtant en garde l’expert en nutrition allemand Hans-Ulrich Grimm. Ces arômes sont, certes, produits à partir de vrais légumes, mais ensuite transformés en laboratoire. Sans aucune garantie quant à leurs effets sur la santé à long terme: l’autorité européenne de la sécurité des aliments a constaté l’absence d’études toxicologiques pour quelque 400 additifs couramment utilisés par les fabricants de denrées alimentaires.
Exhausteurs de goût
Dans la recette des bouillons de poule de Knorr et de M-Budget, on trouve du glutamate. Cet exhausteur de goût a le gros défaut de contribuer à la prise de poids, des études ayant prouvé qu’on mange davantage et plus vite quand il est présent dans l’assiette.
L’additif se cache aussi derrière l’appellation «extrait de levure», dans le bouillon de légumes Fine Food de Coop par exemple. Ce concentré de protéines a le goût de la viande et contient du glutamate naturel, ce qui dispense les fabricants de le déclarer comme tel.
Nous avons également trouvé de faibles quantités de graisse ou d’huile de palme dans quelques emballages. Un ingrédient très mal vu par le WWF, qui explique qu’on déboise des forêts vierges entières en Malaisie et en Indonésie pour en produire et faire de la place aux nouvelles plantations. Sans parler des émanations nocives lors de la production, ni des effets cancérigènes démontrés sur les animaux. Silke Restemeyer de la société allemande pour la nutrition est catégorique à ce sujet: «Les aliments ultra-transformés contenant de l’huile de palme sont à proscrire.»
Coop fait valoir que la proportion de 4,5% de viande de bœuf de son bouillon Fine Food est optimale sur le plan culinaire. Aldi, dans une prise de position, indique que la proportion de légumes pour son bouillon Le Gusto est de 3,5%. Enfin, ce distributeur - de même que la Migros - relève que l’huile de palme utilisée dans ses produits respecte les critères de durabilité.
Katharina Baumann / chr
Un bouillon maison
Préparer soi-même une soupe claire, ce n’est pas compliqué et c’est moins long qu’il n’y paraît. Passer quelques légumes et herbes au mixer, puis compter 10 g de sel pour 100 g de mélange. Enfourner le tout plusieurs heures au four à 70°C.
On peut aussi s’offrir le luxe d’un potage frais en faisant revenir quelques légumes, herbes et grains de poivre dans un peu d’huile. Mouiller au vin blanc jusqu’à hauteur et remplir la poêle d’eau en portant à ébullition, puis laisser mijoter une heure. Passer au tamis et assaisonner: rien de tel pour mouiller un risotto. Cette recette permet par ailleurs de choisir soi-même ses légumes et de varier le goût de la préparation selon les saisons.