Si l’on frissonne à la tombée de la nuit, si on transpire en plein midi, c’est parce que notre corps travaille à notre insu pour se maintenir entre 36°C et 37°C grâce à un système de régulation très performant. Sans ce dispositif, notre température corporelle varierait constamment selon celle de l’air ambiant, ainsi qu’en fonction de notre activité physique.
«Quand on court, le 75% de l'énergie produite par la contraction de nos muscles est perdue sous forme de chaleur alors que 25% seulement nous font vraiment avancer», explique Yan Eggel, médecin associé au service de la médecine du sport à la Clinique romande de réadaptation de la Suva, à Sion. Il en va de même pour le vélo ou la randonnée en montagne.
Pour éviter la surchauffe, plusieurs mécanismes se mettent en place:
⇨ Des échanges avec l’air ambiant limitent l’augmentation de température. La plus grande partie de la chaleur est évacuée par évaporation par le biais de la transpiration et de la respiration. Le reste s’échappe au contact de l’air, de l’eau, par le biais du vent, ou si on touche une surface fraîche.
⇨ La fréquence cardiaque et le rythme de la respiration s’accélèrent.
⇨ Le sang afflue vers la périphérie: les joues deviennent rouges, alors que le débit vers les organes internes diminue.
Ce dispositif garantit que tout fonctionne... jusqu’à un certain point. Si le corps n’arrive plus à se réguler, l’organisme est en danger. Le climat et les prédispositions de chacun jouent un rôle important.
1. Gare aux chaleurs tropicales
Plus l’air est humide, moins la chaleur est supportable. L’indice WBGT (wet bulb glob temperature) permet de déterminer, en tenant compte des effets de la température, du taux d’humidité et du rayonnement solaire, les valeurs à partir desquelles il faut prendre des précautions (voir graphique). On peut ainsi courir à moindre risque quand le thermomètre grimpe à 30°C et que le taux d’humidité est inférieur à 40%. Il faut commencer à faire attention au-delà de ce seuil et, à partir de 50%, on entre en zone rouge: il faut alors s’abstenir de tout exercice physique. En Suisse, heureusement, l’air est assez sec en été (entre 40% et 50%).
2. Esquimau ou touareg
Plusieurs facteurs entrent encore en jeu, selon la physiologie de chacun.
⇨ A partir de 40 ans, la transpiration est moins efficace et on a moins de marge pour augmenter la fréquence cardiaque.
➛Les enfants sont moins bien armés pour résister à la chaleur car ils transpirent moins. Ils ont aussi davantage de peine à s’écouter et à identifier les sensations. Pour mener à bien l’effort exigé, ils s’adapteront jusqu’à ce que l’organisme soit dépassé.
⇨ Certains organismes sont mieux armés que d’autres. Les personnes en surpoids supportent ainsi moins la chaleur.
⇨ Mieux on est entraîné, mieux l’organisme gérera le stress supplémentaire.
⇨ L’altitude et la raréfaction de l’oxygène, au-delà de 2000 mètres, empirent la situation.
⇨ L’acclimatation aide le corps à réagir. Après quelques jours dans un pays chaud, la température corporelle de base diminue, la fréquence respiratoire au repos augmente. En revanche, la sensation de soif et la transpiration viennent plus vite.
⇨ L’alcool et certains médicaments ralentissent la réaction de l’organisme à la chaleur.
⇨ Les coups de soleil empêchent la peau de réagir, car les cellules brûlées par le soleil ne transpirent plus aussi efficacement.
3. Les bons réflexes
Pour limiter les risques, l’idéal est d’éviter l’exercice pendant les heures les plus chaudes de la journée. Porter des vêtements amples et de couleur claire, de préférence en matière synthétique pour laisser l’eau s’évaporer. Chapeau ou casquette et crème solaire s’imposent pour se protéger au mieux et éviter les coups de soleil qui empêchent la peau d’évacuer la chaleur.
Commencer à s’hydrater en absorbant au moins 0,5 l d’eau deux heures avant l’entraînement et 0,3 l juste avant. Pendant l’effort, il faut boire régulièrement (toutes les 15 minutes) sans attendre d’avoir soif.
Si la course se prolonge au-delà de deux heures, ajouter une pincée de sel pour 0,5 l d’eau. Yan Eggel déconseille de boire des boissons isotoniques le jour J sans les avoir testées auparavant, car toutes les marques ne conviennent pas à tout le monde. Après l’effort, boire pour compenser la perte d’eau de l’organisme.
Pour savoir si on a assez bu, le plus simple est d’observer la couleur de l’urine. Plus elle est foncée, plus on est déshydraté.
On peut aussi se peser avant et après l’effort: la perte de poids devrait se situer entre 1% et 2% du poids corporel. Au-delà, les performances baissent drastiquement. Une fois revenu au calme, il est important de boire encore abondamment pour compenser.
4. Trop, c’est trop
Quand on se sent à bout de forces sans pouvoir reprendre son souffle, quand les joues deviennent rouges, quand on a des crampes dans les jambes, il faut s’arrêter! Ces symptômes s’accompagnent de nausées, de crampes abdominales, de maux de tête et de frissons: si on va au-delà c’est un coup de chaleur. «Dans le pire de cas, le sportif devient confus et a des hallucinations. S’il continue malgré tout, il risque de s’évanouir, et même de mourir», met en garde Yan Eggel.
A ce stade, le corps est dépassé et ne réagit plus correctement. Comme le sang afflue vers la surface, les organes internes ne sont plus irrigués et lâchent les uns après les autres. Au-delà d’une température corporelle de 41°C, la vie est en danger: quelques gestes éviteront d’en arriver là.
⇨ Interrompre l’effort immédiatement.
⇨ Desserrer ses vêtements.
⇨ Se coucher à l’ombre, les jambes surélevées.
⇨ Abaisser la température corporelle en s'immergeant dans de l’eau froide. Un linge humide et des poches à glace sous les aisselles sont aussi très efficaces.
⇨ Boire pour éviter la déshydratation.
On appellera les secours si on ne remarque pas rapidement d’amélioration.