Carotte, grains de blé, lait ou encore poisson: leur matrice correspond à la structure de l’aliment brut. Elle est constituée d’un réseau entrelacé de nutriments. Fibres, protéines, glucides, acides gras, antioxydants, minéraux et vitamines se combinent de manière complexe et interagissent entre eux.
Jusqu’au tournant de ce siècle, la qualité d’un aliment n’était jugée que sur la somme de ses nutriments pris séparément. Cette vision est désormais jugée trop réductrice, car elle fait l’impasse sur l’effet matrice: un nutriment a des effets différents sur la santé lorsqu’il entre en présence d’autres composants. Il en va de même lorsque la texture d’un aliment est modifiée.
Vitamine C «boostée»
Une pomme, par exemple, ne contient que 5 mg de vitamine C pour 100 g de fruit, contrairement au kiwi qui en totalise 80 mg. C’est sans compter la matrice de la pomme: les milliers d’antioxydants qu’elle contient potentialisent considérablement l’action de la vitamine C. Cela explique pourquoi il est meilleur de consommer un aliment entier plutôt que certains nutriments sous forme de compléments. Manger du brocoli est plus efficace pour contrecarrer le développement de cellules cancéreuses qu’ingurgiter ses seules molécules souffrées. Cela a été démontré in vitro. De même, il est préférable de manger des grenades entières et non leurs simples polyphénols.
Les interactions entre nutriments peuvent aussi avoir des impacts négatifs. Sur les 300 mg de calcium que l’on trouve dans un verre de lait, 90 mg sont absorbés par l’organisme. Quand, dans une quantité égale d’épinards, seuls 15 mg de calcium sont assimilés. En cause: l’oxalate présent dans ce légume. Il interfère avec l’absorption du calcium.
Les graisses saturées peuvent, quant à elles, avoir des effets opposés selon les aliments. On constate une augmentation de 48% des cas de maladies cardio-vasculaires avec la viande, contre une diminution de 38% avec le lait, pour un même apport en acides gras saturés. Cet effet protecteur est dû à l’interaction des composants du lait. On en compte près de 2000! Le calcium se lie avec une partie des graisses qui ne sont pas absorbées par l’intestin, mais évacuées dans les selles.
Importance de la texture
La texture d’un aliment a aussi un impact sur la santé. Croquer une pomme apporte davantage de bienfaits que la manger en purée ou en boire son jus. Crue, elle nécessite d’être mâchée pour être assimilée par l’organisme. La mastication et le contact prolongé avec la muqueuse digestive permettent une meilleure sécrétion des hormones de satiété et, au final, de manger moins. En purée, la sensation de satiété est largement diminuée, car les sucres sont rapidement libérés dans l’organisme. De plus, sa cuisson diminue fortement sa teneur en vitamine C. Toutefois, les fibres et les minéraux sont intacts. Quant au jus du fruit, il déclenche très peu de signaux de satiété: il ne contient plus aucune fibre, et seulement une partie des minéraux et des vitamines.
Enfin, les galettes de riz soufflé sont souvent présentées comme des aliments sains et peu caloriques. Il n’en est rien: le soufflage que subit le grain de riz déstructure sa matrice, rendant son amidon rapidement digestible. Son index glycémique (85) dépasse alors celui du sucre (65). Afin d’équilibrer cet afflux de glucose dans le sang, le pancréas doit libérer une quantité importante d’insuline. La faim se fait vite ressentir, incitant au grignotage qui favorise le stockage de graisse et donc la prise de poids!
L’effet matrice pourrait bien, à terme, bousculer nos certitudes et nos habitudes. Le Score NOVA présent dans l’appli Nutriscan+ de Bon à Savoir(lire «Eviter ces produits ultra transformés qui nous rendent malades» sur masantemag.ch) constitue une aide précieuse afin de privilégier les aliments les moins transformés possibles.