Chaque année, il naît quelque 400 000 enfants dans le monde grâce à la procréation médicalement assistée (PMA). Et 2000 rien qu'en Suisse, pour un peu plus de 6000 femmes ayant suivi de tels traitements. Et pourtant, même si l'infertilité est considérée comme une maladie, la fécondation in vitro n'est pas prise en charge par les assurances, contrairement aux pays voisins.
De quoi parle-t-on?
Il existe quatre principaux traitements de PMA.
⇨ La stimulation ovarienne: injection d'hormones (gonadotrophines) qui stimulent la production des ovules et leur maturation. Grâce à un contrôle par échographie, on détermine le meilleur moment pour la fécondation, qui aura lieu lors d'un rapport sexuel normal ou avec une insémination intra-utérine (lire ci-dessous).
⇨ L'insémination intra-utérine: après avoir déterminé le moment de l’ovulation (à l’aide d’une échographie vaginale, d'une prise de sang ou de tests urinaires), dépôt d'un échantillon de sperme dans l'utérus à l’aide d’un cathéter. En cas de problème d'infertilité du conjoint, l'insémination peut se faire avec le sperme d'un donneur.
⇨ La FIV (fécondation in vitro): il s'agit de reproduire dans un laboratoire ce qui se passe naturellement dans le corps de la femme dans une succession d'étapes:
- stimulation ovarienne (lire ci-dessus);
- déclenchement des follicules et prélèvement des ovocytes;
- fécondation in vitro en mettant les ovocytes en contact avec le sperme;
- développement des embryons durant 3 à 6 jours;
- transfert d'un ou de deux embryons dans l'utérus à l’aide d’un cathéter. Le solde des embryons peut être congelé pour une prochaine tentative.
⇨ L'ICSI (injection intracytoplasmique de spermatozoïde): même technique que la FIV, mais lorsque les spermatozoïdes sont en nombre insuffisant ou ont une mobilité réduite, il est possible d'en sélectionner un de bonne qualité et de l’injecter directement dans l’ovocyte à l'aide d'une pipette (voir illustration ci-contre).
Les dons d'ovules, d'embryons et les mères porteuses sont interdits en Suisse.
Prise en charge
La stimulation ovarienne et l'insémination artificielle, tout comme les mesures diagnostiques et de surveillance qui leur sont liées, sont remboursées par l'assurance de base, avec garantie de prise en charge par la caisse et autorisation express du médecin-conseil. La femme ne doit cependant pas avoir plus de 40 ans*. Et les inséminations artificielles sont limitées à trois cycles par grossesse. Le don de sperme, réservé aux couples mariés, n'est pas remboursé.
La FIV et l'ICSI non plus ne sont pas pris en charge par l'assurance maladie, ni les médicaments qu'ils nécessitent (même s'ils figurent dans la liste des produits remboursés, puisqu'ils sont liés à une prestation non obligatoire). Ils coûtent pourtant très cher (lire encadré). Mais le Tribunal fédéral n'a jamais changé d'avis, malgré les nombreuses tentatives soulevant régulièrement la question depuis 30 ans. Il l'a répété la dernière fois en 2012, refusant d'entendre l'assurée qui soulignait toutefois que 1,8% des naissances en Suisse sont aujourd'hui issues de ces traitements réservés aux couples infertiles, et que leur taux de réussite est proche de ceux de la reproduction par voie naturelle.
Les juges fédéraux ont préféré soutenir le choix de la Commission des prestations, laquelle déclarait, à l'époque, attendre la révision de la loi fédérale sur la procréation médicalement assistée avant d'entrer en matière sur une nouvelle demande de prise en charge. Or, cette loi, acceptée par le peuple en 2016, est entrée en vigueur le 1er septembre 2017. Il y a donc fort à parier que la question va prochainement revenir sur le tapis. D'autant qu'en autorisant l'examen préimplantatoire de l'embryon avant son transfert dans l'utérus, les grossesses multiples (jumeaux), souvent considérées comme un gros problème de la FIV, vont considérablement diminuer.
*Lors d'un récent recours, le Tribunal fédéral a cependant contesté cette limite, recommandant «une approche individualisée» au cas par cas. Il a donc renvoyé l'affaire devant la justice cantonale d'où elle était issue. A suivre...
Laurent Hêche
Coûts moyens
10 000 fr. pour un traitement
Selon les chiffres publiés par l'Unité de médecine de la reproduction du CHUV, à Lausanne, une fécondation in vitro standard revient à 5470 fr., mille de plus pour une ICSI. Mais il faut y ajouter la modification du cycle naturel (3120 fr.), la culture prolongée des embryons et leur transfert (300 fr.) et la congélation de ceux qui sont excédentaires (350 fr.). Le premier traitement approche donc les 10 000 fr., sans tenir compte du prix des médicaments et des dosages hormonaux.
Si d'autres cycles peuvent se faire grâce à des embryons congelés, leur coût se limitera à 2000 fr. par traitement environ.