L’étude intitulée «Moniteur alimentation et activité physique» est parue en septembre 2024. Menée chaque année depuis 2014 par l’institut de recherche gfs.bern, elle interroge les personnes suisses en âge de voter sur des thèmes liés à l’alimentation et à la consommation de sucre.
Un groupe réunissant toutes les marques
Si l’étude est indépendante, son commanditaire poursuit, lui, un but précis: il s’agit du lobby «Groupe d’information boissons rafraîchissantes», une sous-organisation de la faîtière des producteurs d’eaux minérales et de boissons sucrées. Toutes les grandes marques sont représentées au sein de son comité: Coca-Cola, Red Bull, Rivella, Ramseier (Sinalco), Danone (Evian et Volvic).
Le groupe d’informations met l’accent sur une donnée de l’étude: la désapprobation (70%) des sondés face à une taxe sur les produits sucrés. La première phrase du communiqué de presse martèle: «La population suisse mise sur la responsabilité et l’information plutôt que sur les restrictions dans les questions alimentaires.»
Trop de sucre dans les sodas
En lisant l’étude, on découvre de nombreux résultats qui devraient faire bondir les fabricants de boissons sucrées:
- 96% des personnes sondées pensent que les boissons sucrées devraient contenir moins de sucre
- 58% estiment que la réduction volontaire du sucre effectuée jusqu’à présent par l’industrie est insuffisante
- 81% est favorable à l’interdiction de la publicité pour les aliments malsains destinée aux enfants
En d’autres termes, si l’industrie des sodas tenait compte de sa propre étude, elle devrait revoir, en profondeur, sa feuille de route: elle combat actuellement toute interdiction de la publicité destinée aux enfants.
Lors d’une négociation sur la réduction volontaire de la teneur en sucre des aliments avec la Confédération, le secteur a tout fait pour que cette diminution soit la plus faible possible. Le groupe d’informations boissons rafraîchissantes est, quant à lui, un lobby bien implanté sous la Coupole fédérale et pèse de tout son poids pour empêcher des lois trop strictes en matière d’alimentation (lire «Des politiciens au service de l’industrie du sucre» sur masante.ch).
Avis des consommateurs ignoré
Bon à Savoir a demandé aux fabricants de boissons sucrées de prendre spécifiquement position sur ces différents points. Red Bull a refusé. Coca-Cola n’a répondu que de manière générique. Danone,
Rivella et Ramseier indiquent s’être engagés, dans le cadre de l’initiative Swiss Plegde, à ne pas cibler explicitement les enfants dans leurs publicités, une promesse que Coca Cola a également faite. Ils s’opposent néanmoins à une interdiction de la publicité.
En dernier lieu, les fabricants se réfèrent à leurs alternatives à faible teneur en sucre. Ils préfèrent en effet miser sur une stratégie qui consiste à réduire la teneur en sucre sur l’ensemble de l’assortiment, plutôt que sur chaque boisson. L’accord avec les autorités autorise ce calcul. Quant au groupe d’informations boissons rafraîchissantes, il reste fermement sur sa ligne politique, quitte à contredire sa propre étude: les efforts de l’industrie doivent rester volontaires, et les consommateurs ont le choix de privilégier les produits pauvres en sucre.
Jocelyn Daloz
Soutien massif de la population pour le Nutri-Score
Récemment, Danone a annoncé se retirer du Nutri-Score pour son produit-phare, l’Actimel. Il mettait en cause la pertinence de l’algorithme pour les yoghourts à boire. Rivella et Ramseier justifient de ne pas l’apposer en mettant en cause sa pertinence: trop simpliste, selon Rivella, tandis que Ramseier estime que les déclarations nutritionnelles obligatoires sont suffisantes.
Les fabricants contredisent ainsi leur propre étude: plus de 80% des sondés sont favorables à un système tel que le Nutri-Score, et moins de la moitié se déclare satisfaite avec les tabelles actuelles.
On peut connaître la qualité nutritionnelle d’un aliment en le scannant avec l’application Nutriscan+ de Bon à Savoir. Le résultat affiche le Nutri-Score, les labels, les additifs et le niveau de transformation (NOVA).