L’eau bien chaude, les bulles, le lâcher prise… Promesse de bien-être, les bains thermaux séduisent toujours plus. De nouveaux établissements ne cessent de voir le jour en Suisse. Mais entre wellness et bienfaits pour la santé, la frontière n’est pas toujours très claire pour le baigneur lambda.
On peut barboter voluptueusement quelques heures dans un bassin, voire passer quelques jours de vacances dans un centre balnéaire; on peut aussi se faire prescrire une cure thérapeutique. Anti-douleur, anti-inflammatoire, cicatrisante… les vertus dont on pare les eaux thermales ne manquent pas.
En Suisse, les cures sont prescrites en particulier pour soulager les douleurs articulaires, dans les cas de rhumatismes, d’arthrose, ainsi que les maux de dos, de hanches ou dans le cadre d’une rééducation post-opératoire. «On constate des résultats bénéfiques sur le long terme pour les patients, affirme Michael Norberg, médecin-chef au centre thermal de Lavey-les-Bains. Nous nous occupons désormais beaucoup de patients souffrant de douleur chronique.»
Le thermalisme est aussi prescrit en cas de maladies neurologiques (Parkinson, séquelles liées à un AVC), de fibromyalgie ou même de dépression. «C’est le corps et l’esprit que nous traitons, poursuit le médecin. La qualité de l’eau thermale, son effet déstressant, les traitements de physiothérapie ou d’ergothérapie font partie d’une prise en charge globale.»
La chaleur, l’élément aquatique, les exercices physiques, les minéraux… Plusieurs éléments jouent un rôle lors d’une cure. Il n’est pas facile d’en évaluer leur effet séparément (lire l’encadré). La voie thérapeutique des bains thermaux reste d’ailleurs relativement peu empruntée dans notre pays, comparativement à la France, par exemple. A l’image du service de rhumatologie du CHUV qui privilégie d’autres traitements que les bains thermaux. Non pas par a priori, mais plutôt par culture ou habitude, et parce que les patients n’en font pas la demande, nous explique-t-on au centre hospitalier vaudois.
Alléger la facture
Le coût d’un séjour dans un centre thermal n’est, certes, pas à la portée de toutes les bourses. Les traitements médicaux prescrits par un médecin sont pris en charge par l’assurance de base. Cependant, il faut y ajouter le séjour hôtelier, qui peut se chiffrer à plus de 1500 fr. par semaine. L’assurance de base contribue à alléger la facture, mais à peine: à hauteur de 10 fr. par jour, pendant 21 jours par an, au maximum. Et sous conditions.
Il faut que la cure soit prescrite par un médecin. Il peut s’agir de son généraliste, d’un spécialiste ou d’un médecin rattaché à un centre thermal. Il faut ensuite que la cure ait lieu dans un centre thermal autorisé à pratiquer à la charge de l’assurance obligatoire. Une vingtaine d’établissements font partie de la liste établie par la Confédération dont neuf dans les cantons romands ou bilingues (voir la carte).
Les cures «ambulatoires» sont possibles
Ces centres sont agréés parce qu’ils bénéficient d’un encadrement médical, qu’ils utilisent leur source thermale dans un but thérapeutique et que leur eau exerce ou permet d’attendre «un effet curatif scientifiquement reconnu» en raison de ses propriétés chimiques ou physiques, selon l’Office fédéral de la santé publique.
Le remboursement par l’assurance de base peut couvrir une cure thérapeutique pour toutes sortes de maladies physiques et psychiques. «Il faut néanmoins que le patient fasse une demande de garantie de prise en charge de sa cure balnéaire auprès de son assurance maladie», précise Christophe Kaempf, porte-parole de Santé Suisse.
La facture sera nettement moins lourde pour les personnes au bénéfice de certaines assurances complémentaires qui remboursent tout ou partie des frais des cures balnéaires. Avant d’entamer un séjour, mieux vaut donc se renseigner de manière détaillée auprès de son assureur maladie, afin de savoir si l’établissement choisi est admis et quelles prestations thérapeutiques sont prises en charge, recommande Christophe Kaempf.
Mais les centres thermaux proposent de plus en plus de cures «ambulatoires». Le patient ne dort pas sur place, mais se rend plusieurs fois par semaine dans l’établissement thermal où il suit un programme ciblé sur ses besoins, au sein d’un groupe. «Nous recourons à l’eau thermale de la même manière, explique Michael Norberg. Ces programmes sont notamment adaptés à des gens en arrêt de travail. Nous suivons, par exemple, des personnes souffrant de lombalgies.»
Attention aux contre-indications
Pour les patients comme pour les baigneurs occasionnels, la durée recommandée dans une eau thermale est de 30 minutes d’affilée. Il est conseillé de prévoir un moment de repos avant de s’immerger à nouveau, car la chaleur sollicite beaucoup le cœur. C’est pour cette raison d’ailleurs que les bains thermaux sont déconseillés aux personnes souffrant de problèmes cardiaques.
Même s’ils soulagent les douleurs articulaires, ces bains ne sont pas non plus indiqués dans les moments de crise aiguë. Ils risqueraient d’aggraver l’inflammation.
Geneviève Comby
Une combinaison de bienfaits
L’eau thermale provient d’une source naturellement chaude. En traversant la roche, elle s’est gorgée de différents minéraux et oligo-éléments (soufre, calcium, magnésium, etc.) selon les qualités géologiques du lieu. Ses bienfaits proviennent d’une combinaison d’éléments:
- Dans l’eau, le corps est plus léger, la mobilité facilitée. La pression des jets ou des bulles peut améliorer la circulation veineuse.
- La chaleur facilite la circulation vasculaire et, par conséquent, favorise l’évacuation de l’inflammation.
- Certains minéraux sont réputés posséder des vertus curatives. Le plus connu, le soufre, serait anti-douleur et anti-inflammatoire. «Une eau soufrée a un effet cutané direct. Quelqu’un qui ressent une douleur à l’effleurement, par exemple, sera soulagé assez rapidement une fois plongé dans cette eau», assure le Dr Michael Norberg, du Centre thermal de Lavey-les-Bains. Le centre vaudois collabore notamment avec le CHUV dans la prise en charge des brûlés. «Nous avons observé que l’eau soufrée est apaisante pour les gens qui portent des cicatrices de brûlures fraîches.» Selon lui, les minéraux traversent la peau par porosité, ce mécanisme étant accentué grâce à la chaleur. Quelle est l’ampleur de cette pénétration? Impossible de le dire sur une base scientifique.
Les bienfaits du thermalisme ont été l’objet de nombreuses recherches, les études scientifiques solides manquent toutefois. Les résultats s’appuient en grande partie sur le ressenti des patients.
Un hiver sans eau chaude?
Coût de l’énergie, restrictions… La crise frappera-t-elle les bains thermaux cet hiver? Dans certains établissements, la température de l’eau à la source n’est pas suffisamment élevée et doit d’être chauffée avant d’arriver dans les bassins (lire «Eau chauffée au mazout»).
Le projet d’ordonnance sur les restrictions d’utilisation de gaz, actuellement en consultation, prévoit la possibilité d’interdire la production de chaleur et la préparation d’eau chaude pour les piscines, bassins de natation, bains et bassins de bien-être, bains et cabines de vapeur, et saunas.