Le bénéfice du dépistage remis en question
CANCER DE LA PROSTATE
C’est le cancer le plus fréquent chez l’homme. L’analyse de la concentration de l’antigène prostatique spécifique (PSA) dans le sang est censée permettre de le détecter à un stade précoce et d’augmenter ainsi les chances de guérison. Cette méthode fait pourtant l’objet de critiques depuis plusieurs années.
Sommaire
Ma Santé 02-2020
24.03.2020
Dernière mise à jour:
04.10.2022
Charly Pache
Publiées début 2020, les conclusions d’une vaste étude menée par l'Institut allemand pour la qualité et l'efficacité des soins de santé sont inquiétantes: ces tests comportent plus de risques que de bénéfices et plongent de nombreux hommes dans une angoisse inutile. Les scientifiques ont évalué au total onze études englobant plus de 400 000 participants. Le seul bénéfice reconnu est que, grâce à ce test, mais sur une période de 12 ans, 3 hommes sur 1000 évitent de dé...
Publiées début 2020, les conclusions d’une vaste étude menée par l'Institut allemand pour la qualité et l'efficacité des soins de santé sont inquiétantes: ces tests comportent plus de risques que de bénéfices et plongent de nombreux hommes dans une angoisse inutile. Les scientifiques ont évalué au total onze études englobant plus de 400 000 participants. Le seul bénéfice reconnu est que, grâce à ce test, mais sur une période de 12 ans, 3 hommes sur 1000 évitent de développer un cancer avec des métastases qui migrent vers d'autres organes (voir le tableau). Ce dépistage précoce n'augmente par contre pas l’espérance de vie des patients. Le plus grand bémol de ce test est certainement le nombre très élevé de faux positifs. Pour 200 patients diagnostiqués positifs sur 1000, des analyses supplémentaires n'ont pas confirmé la présence d'une tumeur: 20% des patients ont donc été inutilement angoissés et ont été soumis à des interventions médicales superflues.
Pour un nombre d’hommes estimé entre 35 et 60 sur la totalité des participants, le test du PSA a correctement détecté le développement d’un cancer de la prostate mais il s’agissait de tumeurs qui progressaient lentement et ne représentaient pas un danger immédiat pour la survie des patients. Leur espérance de vie n'a ainsi pas été améliorée mais ils ont dû subir des traitements anticancéreux qui entraînent un risque d’incontinence pour 3 patients sur 1000 et une impuissance définitive pour 25 d’entre eux, parfois à un âge relativement jeune.
Antécédents familiaux
Le réseau de médecins Medix, basé à Zurich, déconseille aux hommes sans risques particuliers et aux plus de 70 ans de faire appel au test du PSA. Dans le cas d’antécédents familiaux, si un père, un oncle ou un frère est atteint d'un cancer de la prostate, il est vivement conseillé de consulter le médecin de famille à partir de 45 ans. Le spécialiste Tullio Sulser dirige la Clinique d'urologie de l'hôpital universitaire de Zurich et est président de la Société suisse d'urologie. Il rappelle que le test du PSA est actuellement «toujours le seul test» qui peut donner une indication sur les risques potentiels de développer un cancer de la prostate. Cependant, ce test n'est «que d'une utilité restreinte» si on ne le fait qu’une seule fois. C’est en observant les résultats sur de nombreuses années que les risques peuvent être évalués de manière plus précise.
L’organisation Prostata-Hilfe en Allemagne préconise une prise en charge individuelle de chaque patient afin d’évaluer à quel point une tumeur est dangereuse. Ceci est d’autant plus important que l'évolution de la maladie peut être très différente d’une personne à l’autre. Chez les hommes âgés par exemple, une observation régulière est souvent suffisante.
Wiebke Vortriede / chp