Parmi les nombreuses légendes qui circulent dans le domaine de la consommation, celle qui prête un droit de révocation absolu pour tout achat ou contrat fait hélas partie des plus tenaces. Pourtant, le principe en droit suisse est qu’un contrat, une fois conclu, est ferme. Ce n’est que dans certaines situations bien précises que le droit de révocation de l’article 40a du Code des obligations (CO) s’applique. Faisons le point afin de tordre le cou, une bonne fois pour toutes, aux idées reçues.
Démarchage, quèsaco?
En lisant l’article 40a CO plus attentivement, on constate qu’il concerne spécifiquement et uniquement les contrats conclus à la suite d’un démarchage à domicile. Inutile donc d’invoquer cette disposition au supermarché du coin si vous vous rendez compte, en sortant du magasin, que vous n’avez, finalement, pas envie de vous encombrer d’un nouveau fer à friser.
Autre précision: ne sont visés que les contrats portant sur des sommes supérieures à 100 fr. et qui concernent des objets, des meubles, des marchandises, ou alors des services. On pense notamment aux réparations, à des contrats d’entreprise, des mandats, des leasings ou encore des abonnements de télécommunication, qu’il s’agisse de téléphonie fixe ou mobile, d’internet ou de la TV par câble.
Et, pour qu’il y ait démarchage, il faut absolument que le consommateur ait été sollicité à l’improviste par le vendeur. Ainsi, pas de droit de révocation si vous avez vous-même pris contact avec le démarcheur ou que vous avez préalablement fixé un rendez-vous à votre domicile. Sachant que de nombreuses sociétés procèdent en deux temps – téléphone à la «victime» pour convenir d’une date avant de passer à l’attaque le jour J –, cette nuance a toute son importance.
Attention: deux grandes catégories sont exclues du droit de révocation de l’article 40a CO. Il s’agit des ventes d’immeubles et, surtout, les contrats d’assurances. Une restriction de taille quand on connaît les ravages causés par le démarchage des courtiers en assurances…
«Domicile», une notion large
Quand on parle de démarchage à domicile, le premier exemple qui vient à l’esprit est celui du vendeur d’aspirateurs qui s’invite chez vous à l’improviste. Pourtant, le champ d’application de l’article 40a CO s’étend au-delà de votre pas de porte. Ainsi, les achats ou les engagements pris à la suite d’un démarchage sur la voie publique – rues, places, trottoirs, parkings publics –, sur votre lieu de travail ou dans les transports publics (payants ou pas, peu importe) peuvent être révoqués dans les sept jours.
D’autres situations plus particulières sont également visées, notamment les manifestations publicitaires liées à une excursion – les fameux «voyages-casseroles» – ou à encore les invitations à un repas ou à une dégustation qui se révèlent, au final, être un prétexte pour inciter les participants à acheter un bien ou un service.
Grands absents de cette liste: les stands de marché, les foires et autres comptoirs où les sollicitations de vendeurs souvent très convaincants sont légion avec, à la clé, des achats pas toujours mûrement réfléchis. Le législateur a pourtant considéré que, justement, le chaland qui se rend à ce genre de manifestations doit s’attendre à y être activement poussé à la consommation. Le garde-fou de l’article 40a CO ne se justifie ainsi pas dans ce cas. Il vaut donc mieux réfléchir à deux fois avant de craquer pour une nouvelle batterie de cuisine lors des prochaines Automnales!
Et le démarchage par téléphone?
A ce jour, le démarchage téléphonique – pourtant en constante augmentation – ne fait malheureusement toujours pas partie des cas permettant de faire usage du droit de révocation dans les sept jours. Au vu du nombre croissant de consommateurs qui se retrouvent avec des abonnements de téléphonie à ne plus savoir qu’en faire, parce qu’ils ont simplement répondu «oui» lors d’un tel démarchage, cette lacune doit être rapidement comblée. Rappelons que la question a été abordée à plusieurs reprises par le Parlement, grâce à une initiative parlementaire inspirée d’un éditorial de Bon à Savoir*.
Kim Vallon
* Lire l’article «Démarchage téléphonique: tout finit par arriver!»