Les antidouleurs contenant du diclofénac ne se trouvaient jusqu’à la fin 2018 qu’en pharmacie. A juste titre, estime la doctoresse Stephanie Wolff, médecin-conseil pour Ma Santé: «Ils peuvent causer des problèmes d’estomac, voire des dommages aux reins et au foie.» Ces médicaments font partie des plus de 500 références que l’autorité des produits thérapeutiques Swissmedic a transférées fin 2018 de la catégorie C à la catégorie D, les rendant disponibles en droguerie. Dans la liste figurent aussi des médicaments antidiarrhée et des antidépresseurs à base de plantes.
Ce chamboulement fait suite à la révision de la loi sur les produits thérapeutiques ayant pour but de libéraliser la dispensation des médicaments. La catégorie C, concernant des médicaments remis sans ordonnance mais sur conseil en pharmacie, a été biffée à fin 2018. La grande majorité (85%) des préparations classées C a alors été transférée dans la catégorie D.
De nombreux médecins désapprouvent ce changement. Outre le diclofénac, des préparations à base de millepertuis ou d’huile de lavande contre la dépression ou l’anxiété sont également concernées. «Dans le cas de ces produits, le conseil d’un médecin ou d’un pharmacien est nécessaire, explique Stephanie Wolff. Il est important de déterminer si le patient a besoin d’une psychothérapie ou s’il présente une tendance suicidaire.»
Par ailleurs, le millepertuis présente un risque d’interaction avec des anticoagulants et des médicaments pour le cœur. Le personnel des drogueries ne disposerait pas toujours de l’expertise suffisante pour conseiller correctement les patients. Un avis que ne partage pas Swissmedic, qui estime que les droguistes possèdent les connaissances nécessaires.
Etzel Gysling, médecin et éditeur de la revue Pharma-Kritik, considère que les critères selon lesquels les médicaments ont été recatégorisés ne sont pas clairs: «Je ne comprends pas pourquoi les antidiarrhéiques contenant du lopéramide peuvent désormais s’acheter en droguerie, mais pas ceux à base de dompéridone.» En effet, les deux substances peuvent causer des arythmies cardiaques.
Swissmedic réplique que les médicaments ont été classés selon des critères scientifiques. Les drogueries ne peuvent pas vendre de préparations pouvant masquer une maladie grave ou ralentir des thérapies vitales.
L’Association suisse des droguistes fait pour sa part remarquer que dans un petit nombre de cantons, les droguistes sont autorisés depuis des décennies à vendre des médicaments classés C, sans que les pharmaciens cantonaux, qui en assurent la surveillance, n’aient eu à intervenir. Le personnel demande systématiquement si le patient prend d’autres médicaments. En cas de doute, la personne est renvoyée vers un médecin ou un pharmacien.
Andreas Gossweiler/sp
Zoom: Sirop contre la toux en catégorie B
Une petite partie (15%) des plus de 500 médicaments réévalués s’est vue promue en catégorie B, à savoir celle qui jusqu’ici comprenait des médicaments soumis à ordonnance. Parmi eux figurent les sirops contre la toux contenant de la codéine, une substance présentant un risque important d’utilisation abusive. Faudra-t-il désormais une ordonnance afin d’avoir accès à ces sirops? La réponse est non.
La catégorie B a été assouplie. Les médicaments transférés ne nécessitent pas d’ordonnance médicale, mais leur remise sera documentée et assortie du conseil d’un pharmacien. Cela signifie que le patient devra donner son nom et son adresse, comme c’est par exemple le cas pour la pilule du lendemain.
Enfin, près d’une centaine de médicaments ont été rétrogradés de la catégorie D à E et deviennent accessibles en vente libre, sans conseil spécialisé. Il s’agit par exemple de pastilles bronchiques ou de solutions désinfectantes. sp