La population suisse mange trop de viande: la Société suisse de nutrition conseille de se limiter à 360 grammes par semaine et par personne alors que la consommation moyenne est de 780 grammes, soit plus de deux fois trop! Pour préserver notre santé, nous aurions tout intérêt à nous tourner davantage vers les protéines végétales, qui ne fournissent qu’un tiers de l’apport protéique total, comme le décrit l’enquête nationale sur l’alimentation (menuCH) publiée l’été passé. Voici les conseils pour «végétaliser» nos assiettes et les rééquilibrer.
Pourquoi consommer des protéines?
On dit qu’elles sont les briques de notre corps car elles font partie intégrante de notre squelette, nos tissus, nos muscles, nos ongles et nos cheveux, qu’elles renouvellent en permanence. Si elles n’apportent pas d’énergie à l’organisme, elles sont indispensables à son bon fonctionnement. C’est ainsi qu’elles permettent de synthétiser:
- l’hémoglobine qui assure le transport de l’oxygène vers nos cellules;
- des enzymes digestives qui assurent la bonne absorption des nutriments;
- des anticorps indispensables à notre système immunitaire;
- des neurotransmetteurs qui permettent une bonne communication entre nos neurones;
- des hormones qui transmettent toutes sortes de messages chimiques dans l’organisme.
On comprend qu’une carence en protéines peut causer de nombreux dysfonctionnements: favoriser la fonte des muscles, par exemple, ou diminuer notre résistance aux infections.
Calculer ses besoins quotidiens
Pour un adulte en bonne santé, les apports quotidiens recommandés sont de 0,8 gr. par kilo de poids corporel. Ainsi, une personne pesant 70 kg a besoin de 56 gr. de protéines par jour. A quelques exceptions près, la population suisse dépasse ses besoins avec 1,2 gr. pour les hommes et 1,1 gr. pour les femmes.
Cependant, certaines populations ont des besoins accrus. En premier lieu, les femmes enceintes et allaitantes, pour qui on recommande entre 0,9 à 1,2 gr. par kg et par jour.
C’est aussi le cas des personnes âgées de plus de 65 ans, chez qui la synthèse protéique est moins efficiente. Pour contrer la perte musculaire, la recommandation s’élève à 1 gr. par kilo de poids corporel. Cet objectif n’est pas toujours facile à atteindre car ces personnes ont tendance à perdre goût et appétit et manifestent moins d’intérêt pour la viande, ainsi qu’une plus forte attirance pour les produits sucrés. A cela peuvent s’ajouter des difficultés pour mastiquer la viande. Cette réalité est confirmée par l’enquête MenuCH qui relève que la moitié des personnes âgées ne consomment pas suffisamment de protéines.
Enfin, les sportifs de haut niveau ont également des besoins supplémentaires de 1,2 à 1,7 gr. selon le sport pratiqué.
Les bonnes sources des protéines
Les protéines d’origine animale ont la particularité de contenir tous les acides aminés essentiels (lire encadré). Elles se trouvent évidemment dans la viande, le poisson et les produits de la mer, mais aussi dans les œufs, le lait et ses dérivés (fromages, yogourts, etc.).
Ce n’est pas le cas pour les protéines d’origine végétale. Les céréales sont pauvres en lysine, un acide aminé essentiel. Les légumineuses, elles, contiennent très peu de méthionine. Mais la nature étant bien faite, l’association de céréales et de légumineuses permet de compenser l’absence de protéines animales.
On retrouve cette combinaison à travers le monde: riz avec soja ou lentilles en Asie, blé et pois chiches au Maghreb, riz ou maïs avec haricots rouges ou noirs en Amérique latine, etc. Notons que cette association peut aussi se faire en cours de journée, voire sur quelques jours et non uniquement au cours du même repas. En bref, le maître-mot est la diversité des sources.
Quelques bonnes alternatives à la viande
Remplacer les protéines animales de son assiette peut se révéler un véritable casse-tête pour les néophytes; pourtant on trouve bien des alternatives, en dehors du tofu. Et, dans ce domaine, les recettes ne manquent pas.
- Le seitan: cette pâte à base de gluten s’obtient par le «lavage» de la farine de blé. On l’achète tel quel, mais certains le font maison. De toutes les alternatives à la viande, c’est la plus riche en protéines (en moyenne 20%) et celle dont la texture est la plus proche. Le seitan se cuisine en émincé, pain de «viande», brochette, etc. On évitera de le saler car il en contient souvent déjà beaucoup. Naturellement, cette alternative ne convient pas à ceux qui évitent le gluten!
- Le tempeh: spécialité indonésienne, ce bloc de soja cuit est fermenté grâce à l’ajout d’un champignon qui le rend plus digeste. Riche en protéines (16% environ), sa texture est ferme; il peut être poêlé, grillé, mijoté ou rôti au four. Une entreprise familiale du Nord vaudois en a fait un produit local et bio («Le Bon Tempeh»).
- Les légumineuses: pois chiches, haricots rouges, pois cassés… Ces aliments sont bien dotés en protéines (en moyenne 8% sous forme cuite), mais aussi en fibres et en minéraux. De plus, ils sont rassasiants car leur index glycémique est bas.
Les substituts de viande: du bon et du mauvais
Depuis quelques années, la gamme de ces produits ne cesse de s’accroître. On les trouve sous forme de burger, nuggets, émincé, boulettes, etc. Ils sont confectionnés à partir de bons aliments: Quorn (champignons microscopiques), légumineuses, seitan…
Mais les produits qu’on en tire sont généralement ultra transformés (trop de gras, de sel et d’additifs); leur consommation doit alors rester occasionnelle. Mieux vaut lire les étiquettes et choisir ceux qui ont une quantité suffisante de protéines (12 gr. au minimum) et une teneur en graisse inférieure à 10 gr. pour 100 gr.
Des bienfaits certains pour la santé
Diminuer la consommation de protéines animales et augmenter celle des protéines végétales constitue un atout pour notre santé à maints égards:
- davantage d’antioxydants pour protéger nos cellules contre le vieillissement prématuré et prévenir certains cancers;
- davantage de sucres à index glycémique bas pour diminuer le risque de diabète type 2;
- davantage de fibres bénéfiques pour entretenir et garantir la qualité de notre microbiote;
- moins de graisses saturées pour préserver notre système cardiovasculaire
Adapter son alimentation ne signifie pas simplement écarter la viande de son assiette 3 à 4 fois par semaine; encore faut-il la remplacer par des aliments riches en protéines végétales ainsi que du poisson, des oléagineux, des œufs ou des produits laitiers.
Doris Favre, diététicienne diplômée
Les acides aminés
On peut comparer les protéines à des colliers de différentes longueurs, dont les perles sont les acides aminés. L’insuline, par exemple, est composée de 51 acides aminés alors que l’hémoglobine en compte 574! Notre corps utilise une vingtaine d’acides aminés. Lorsqu’il lui en manque certains, il peut les produire à partir des éléments de base qui les constituent. Cependant, 9 acides aminés, dits essentiels, doivent impérativement être apportés par l’alimentation, car notre organisme est incapable de les fabriquer.