Le déshabillage est, de façon surprenante, une problématique rarement évoquée. Le moment de l’examen physique est pourtant un moment particulier où le patient doit se dévêtir face à un professionnel qui, pour le soigner, regarde ou touche son corps dénudé. Une étude réalisée en France auprès de patients d’une consultation de médecine générale a montré que les attitudes variaient fortement lorsqu’un médecin leur disait «déshabillez-vous». La plupart se mettent en sous-vêtements, certains enlèvent le haut, un très faible pourcentage se déshabille complètement.
Les situations sont nombreuses et varient fortement suivant la spécialité du professionnel. Chez l’ophtalmologue, vous n’aurez pas besoin de vous dévêtir, chez le généraliste un peu plus, chez les urologues, gastroentérologues et gynécologues, plus encore. Cette question du déshabillage ne concerne d’ailleurs pas que les médecins mais tous les professionnels de la santé. Pour certains, on pense en particulier aux physiothérapeutes et aux ostéopathes, s’ajoute en plus la question du contact physique.
Le moins possible
La règle principale devait être que le patient doit se déshabiller le moins possible, suffisamment pour que le professionnel puisse faire son examen mais rien de plus. Les études montrent que le ressenti du patient risque d’être négatif lorsque la différence d’âge entre soignant et soigné est grande, lorsqu’il existe une opposition de sexe et lorsque le soignant est un inconnu. Le comportement du médecin est naturellement un élément déterminant, que ce soit sa discrétion pendant la phase de déshabillage ou les mots qu’il utilise.
Quelles règles pour les médecins?
A ma connaissance, cette question du déshabillage, et donc du respect du patient durant ce moment particulier de la consultation, n’est pas abordée durant la formation des soignants. On peut bien sûr dire qu’il s’agit de bon sens et que le respect du patient fait partie intégrante du travail du soignant. Au vu de la différence de situation entre l’examinateur et l’examiné, on peut tout de même regretter que les professionnels soient si peu sensibilisés à cette thématique.
La société suisse de gynécologie a tout de même rédigé à l’intention de ses membres un document dont le titre donne tout de suite la couleur: «Directives et aide-mémoire concernant l’inconduite à caractère sexuel au cabinet médical.» On peut lire dans ce document:
- Les patientes doivent disposer d’une cabine pour se préparer à l’examen afin d’être protégées du regard du médecin.
- On évitera l’examen d’une patiente nue. D’abord on examinera les parties supérieures et ensuite les parties inférieures de son corps ou vice-versa. Autrement on lui mettra à disposition un drap ou un peignoir.
- S’il s’agit d’un premier examen et si l’examinateur est un homme, on demandera à la patiente si elle souhaite la présence à ses côtés d’une personne de sexe féminin pendant l’examen.
- Avant et après l’examen, on l’expliquera brièvement à la patiente.
- On prêtera attention au langage. Ce dernier doit être professionnel. Des observations nonchalantes ne font pas partie de l’examen.
- On évitera des compliments sur les attributs physiques ou sur la belle lingerie. On ne fera pas de remarques d’appréciation sur l’apparence du corps telles que sa forme, son poids ou du piercing.
- On évitera de toucher le corps de la patiente de manière inappropriée ou trop longue.
Le simple «déshabillez-vous» ne devrait d’ailleurs plus exister. Le médecin doit donner des informations précises à son patient. «Retirez uniquement votre blouse pour que je puisse ausculter votre cœur et vos poumons.» Ou pour un électrocardiogramme chez une femme, «je vais coller des électrodes sur votre thorax, veuillez enlever le haut, y compris votre soutien-gorge».
J’ai écrit à la Société suisse de gastroentérologie pour savoir s’ils avaient sur cette question du déshabillage des recommandations à l’intention de leurs membres, ils m’ont répondu que non. La société suisse d’urologie, elle, n’a tout simplement pas répondu à mon courriel.
Les patients ont leur mot à dire
Si, en théorie, le patient ne devrait pas avoir à intervenir, en pratique il est important qu’il le fasse chaque fois qu’il le juge utile: Quels habits dois-je retirer? Que souhaitez-vous contrôler? Le patient doit aussi, s’il en ressent le besoin, pouvoir se faire expliquer chaque geste effectué par le professionnel. En cas d’abus ou de doute sur l’adéquation d’un examen, il doit en parler à ses proches ou à une organisation de défense des patients.
Derrière cette question du déshabillage se trouve la question du respect du patient, un thème non négociable. Si vous trouvez qu’un examen ne se déroule pas comme il le devrait, manifestez-vous!
Dr Jean Gabriel Jeannot, médecin, spécialiste en médecine interne