La PPE (propriété par étages) a le vent en poupe, puisqu'elle concerne les deux tiers des logements construits en Suisse depuis une vingtaine d'années. Un succès dû, notamment, à la rationalisation des frais (terrain réduit, un seul toit, un seul chauffage, etc.) qui en fait une solution souvent plus avantageuse que la propriété individuelle. Revers de la médaille: il n'est pas toujours aisé de distinguer ce qui appartient au copropriétaire et à la communauté. Or, cela a toute son importance en cas de modification, de transformation ou, plus fréquemment encore, d'entretien, ne serait-ce que pour savoir qui paie quoi.
Très grossièrement énoncé, le copropriétaire a un «droit exclusif» sur tout ce qui est situé à l'intérieur de son «bien d'étage», qui doit être indépendant. Autrement dit: il peut faire à peu près ce qu'il veut à l'intérieur de son appartement, pour autant que cela n'ait pas de conséquences fâcheuses pour l'ensemble du bâtiment et pour les autres membres de la PPE. Mais la loi distingue les parties exclusives «ordinaires» de celles qui se situent à l'extérieur du bien d'étage ou même qui sont visibles depuis l'extérieur, ce qui complique passablement les choses…
A l'opposé, les parties «communes» (terrain, façades, couloirs, escaliers, ascenseurs, buanderie, toit, chauffage, etc.) sont gérées par l'ensemble des copropriétaires, selon un mode décisionnel complexe*. La participation financière est, alors, pondérée en fonction de la surface et de la qualité de chaque appartement (centièmes ou millièmes).
Dès lors, à chaque fois qu'il faut sortir le portemonnaie, une question cruciale se pose: est-ce moi qui doit payer ou l'ensemble de la PPE? Petit inventaire (non exhaustif) des situations conflictuelles les plus courantes.
Les caves
La constitution de caves en bien d'étage est de plus en plus courante, quand bien même cela contrevient à l'exigence de l'indépendance d'une unité d'étage (elles sont la plupart du temps subordonnées à des locaux principaux). Rappel: pour autant que cela ne lèse pas les droits des autres copropriétaires ou n'endommage pas d'autres parties (exclusives ou communes), une cave peut être utilisée à d'autres fins que l'entreposage, comme local de bricolage, de jeu, de répétition de musique, mais pas, ou rarement, à des fins d'habitation.
Le chauffage
Le chauffage est une bête à chagrin au sein d'une PPE, car il faut distinguer les éléments qui touchent tout le monde de ceux qui concernent chaque propriétaire individuellement.
Les radiateurs, fourneaux ou autres poêles, de même que toute la tuyauterie et les vannes qui les relient à l'intérieur des appartements sont à la charge du propriétaire.
La question est plus délicate avec le chauffage au sol. Il semblerait logique que les serpentins intégrés dans le plancher soient considérés comme de la tuyauterie. Mais leur entretien ayant une importance déterminante pour la solidité et la structure du sol, et donc pour le plafond de l'appartement du dessous, certains juristes estiment qu'ils doivent êtres considérés comme une partie commune.
En revanche, le chauffage central (chaudière et brûleur notamment) est clairement commun, de même que les conduites qui amènent l'eau jusqu'à l'entrée des appartements.
Les conduites
Les conduites d'eau, de gaz, d'électricité, etc., deviennent exclusives du moment qu'elles pénètrent dans les limites de l'appartement et ne concernent plus que l'usage qui en sera fait par le propriétaire. Mais un tuyau traversant un appartement rien que pour en alimenter un autre sera soit commun, soit attribué exclusivement au destinataire. Et attention: ce n'est pas parce qu'une conduite est, par exemple, bouchée dans un appartement que son propriétaire doit forcément supporter les frais de réparation. S'il s'avère que le problème est dû à un défaut affectant le système central (par exemple, un pente insuffisante), ils seront pris en charge par la communauté.
Les armoires murales
Une armoire murale située dans les parties communes (par exemple dans le couloir devant chaque entrée, pour déposer les chaussures) peut être exclusive, pour autant qu'elle soit intégralement réservée à son propriétaire, que son accès soit propre et garanti et qu'elle puisse être fermée à clé.
Les portes
Toutes les portes se situant à l'intérieur de l'appartement sont exclusives. La porte d'accès aussi, même si elle ne peut être aménagée librement sur sa face extérieure (elle doit être conservée dans sa forme et sa couleur originale).
Les murs
Pas de problème avec les murs extérieurs ainsi que les murs intérieurs porteurs: ils sont obligatoirement communs. A l'inverse, le propriétaire a, normalement, le droit de faire à peu près ce qu'il veut des murs non porteurs situés dans son appartement, pour autant qu'ils ne soient pas communs avec une autre unité d'étage ou une surface commune. Il peut donc y faire des ouvertures, les démolir ou les déplacer, sauf si le règlement (ce qui est souvent le cas) soumet de tels travaux à l'accord de l'administrateur.
Les revêtements ou les sols
La peinture murale, la tapisserie, les lambris, les parquets, les tapis ou les linoléums peuvent être modifiés, transformés ou supprimés à la guise du propriétaire. Sauf si ces travaux péjorent la solidité, l'isolation ou l'imperméabilité du bâtiment en général.
La cheminée
Le problème de répartition est assez similaire à celui du chauffage. Si le foyer est à l'intérieur de l'appartement, il est exclusif. Ainsi que la conduite d'évacuation de la fumée, tant qu'elle se trouve dans l'unité d'étage. Mais la partie qui émerge du toit est commune, puisqu'elle participe à l'aspect extérieur du bâtiment et qu'elle sert, le plus souvent, plusieurs appartements.
Le balcon
Le balcon, visible depuis l'extérieur, ne constitue pas à proprement parler un local. Il ne devrait donc pas être soumis au droit exclusif, ce qui est pourtant souvent le cas. La plupart des Registres fonciers romands acceptent, en effet, que la partie interne soit exclusive, mais le canton de Zurich s'y oppose formellement! En revanche, la partie extérieure du balcon est impérativement commune, notamment pour tout ce qui touche à son étanchéité.
Les fenêtres
Même problème qu'avec le balcon: comme une fenêtre détermine l'aspect extérieur, elle devrait logiquement faire partie des éléments communs. Mais, son utilisation concernant surtout le propriétaire, on la considère comme une partie exclusive. En revanche, celui-ci ne peut la modifier, la transformer ou la supprimer sans autorisation de la communauté, car, ce faisant, il modifierait l'aspect extérieur du bâtiment. Même raisonnement pour les parties annexes à l'instar des stores ou des volets. Enfin, les façades vitrées – qui, dans les nouvelles constructions, remplacent de fait une bonne partie des murs extérieurs – doivent être considérées comme communes.
La place de parc
Contrairement à un garage qui, avec un accès propre pouvant être fermé, est considéré comme un local annexe et peut donc être exclusif, une place de parc est presque toujours considérée comme une partie commune. Il est, en revanche, courant d'accorder pour chaque parcelle un droit d'usage particulier à tel ou tel propriétaire, ce qui exclut que les autres s'y parquent.
Christian Chevrolet
Bonus web:les règles de la majorité dans une PPE