Qui n’a jamais eu les oreilles qui sifflaient ou bourdonnaient en sortant d’un concert? Cette perte d’audition est le plus souvent temporaire. «Le fonctionnement des cellules ciliées (sensorielles, ndlr) de l’oreille est altéré, puis revient à la normale», explique Hélène Cao Van, responsable médicale de l’unité d’audiologie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).
Consulter dès le lendemain
Que faire en cas de bourdonnements, de sifflements ou de sensation cotonneuse dans l’oreille?
Lorsque ces sensations disparaissent quelques heures après l’exposition au bruit: nul besoin de consulter votre médecin. Mais une «pause auditive» s’impose. «Il faut mettre l’oreille au repos pendant un à deux jours pour lui laisser le temps de bien récupérer, recommande Hélène Cao Van. Eviter, entre autres, de se rendre dans des endroits bruyants ou d’écouter de la musique avec des écouteurs.»
Si des sifflements et des bourdonnements persistent le lendemain d’un concert ou d’une soirée en club: contactez votre médecin. Il peut y avoir un œdème dans l’oreille, susceptible de provoquer des lésions permanentes. Le médecin évaluera la pertinence d’un anti-inflammatoire à base de corticoïdes et recommandera un repos auditif. Ne tardez pas: plus le trouble est pris en charge rapidement, meilleures sont les chances de récupérer.
Notre capital auditif ne se régénère pas
Nos oreilles ont besoin d’être chouchoutées. Dès la naissance, elles comptent chacune quelque 15 000 cellules ciliées, essentielles pour la transmission des sons. Ce capital auditif ne se régénère pas lorsqu’il est endommagé.
«L’oreille a une mémoire de ce qu’elle a subi», prévient Jean-Michel Klein, président de la formation continue des médecins ORL en France (ORL-DPC). Il décrit un effet cumulatif, lorsqu’on s’expose à des bruits dépassant 80 décibels A («dB(A)», une valeur tenant compte de la sensibilité humaine). «Les cellules ciliées ne parviennent plus à récupérer et perdent leurs qualités. Quelqu’un qui travaille dans le bruit sans se protéger correctement va finir par perdre son audition.»
Les lésions auditives constituent la maladie professionnelle la plus fréquente en Suisse, avec plus de 1000 cas par an, provenant notamment du secteur du bâtiment.
Conseil: Porter des protections adéquates pour limiter les microtraumatismes auditifs (lire encadré). Au niveau professionnel, l’employeur est tenu légalement de mettre à disposition des protecteurs d’ouïe efficaces, relève la Suva.
Eviter l’exposition à des bruits trop forts dans des intervalles rapprochés. D’où l’importance des «pauses auditives».
Inégaux face au bruit
Il existe un risque pour l’audition à partir de 80 dB(A). Plus le niveau sonore est élevé, plus l’exposition doit être courte. Attention, nous ne sommes pas égaux face au bruit. «Il y a des facteurs génétiques: une exposition en dessous de 80 dB(A) peut déjà être préjudiciable pour certaines personnes», prévient Hélène Cao Van. Raison supplémentaire pour bien se protéger!
Sébastien Sautebin
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Protéger son ouïe
Parmi les protections auditives, on trouve fréquemment les tampons en mousse extensible, mis à disposition dans les salles de concert. Pour les placer correctement, il faut former un petit boudin entre les doigts, l’introduire dans le conduit auditif et appuyer dessus 30 secondes pendant la phase d’extension.
Une solution qui n’est pas toujours idéale pour Hélène Cao Van: «Nous avons tous des conduits externes différents; ces tampons ne fonctionnent pas très bien chez certaines personnes et peuvent être mal mis. Le porteur ne sera pas protégé totalement. De plus, les fréquences ne sont pas atténuées de manière uniforme, le son n’est pas agréable.»
Alternative intéressante: les tampons auriculaires en plastique prémoulé.
Il peut valoir la peine d’opter pour des protections sur mesure chez un audioprothésiste. Il existe aussi, notamment pour les musiciens et les mélomanes, des systèmes avec des filtres interchangeables qui permettent de réduire le son à différents niveaux sans le déformer.
Les casques antibruit constituent des solutions efficaces, et sont recommandés pour les enfants.
On peut enfin décider de s’éloigner de la source sonore, tout simplement. «Reculer de deux ou trois pas peut faire une vraie différence, souligne Hélène Cao Van. Car l’intensité du bruit diminue de manière exponentielle.»