Quoi de mieux qu’une baignade dans le lac pour se rafraîchir en pleine canicule? Un plaisir estival que l’on partage tant en couple qu’entre amis, avec son enfant ou durant une promenade avec son chien. Mais pour éviter que les algues bleues toxiques ne gâchent la fête, mieux vaut contrôler l’état de l’eau et de la rive avant de plonger (lire «Nos conseils»).
On parle d’algues bleues, mais il s’agit en réalité de cyanobactéries. Elles ont fait leur retour pour la troisième année consécutive, à la mi-mai déjà. Deux chiens ont péri après un contact au bord du lac de Greifen (ZH). Les algues flottaient près du port, entre les bateaux, et certains résidus filamenteux reposaient sur la rive, emportés par le vent et les vagues durant le récent orage, relate une note de service du canton de Zurich. Les chiens sont morts après avoir léché ou ingéré ces agrégats toxiques.
Au cours des deux dernières années, plusieurs zones du lac de Neuchâtel, de lacs alémaniques et de points d’eau valaisans ont connu des efflorescences de cyanobactéries. Leur prolifération a entraîné de nombreuses intoxications mortelles de chiens. Les autorités cantonales ont tantôt diffusé des appels à la prudence, tantôt annoncé des interdictions de baignade plus ou moins longues, dont l’exemple marquant du lac de Neuchâtel durant l’été 2020.
Où et quand ouvrir l’œil
Les cyanobactéries prolifèrent dans les environnements riches en nutriments issus d’activités agricoles, urbaines ou industrielles, au cours de périodes ensoleillées et de températures élevées, explique Francesco Pomati, du département Ecologie aquatique de l’Institut fédéral suisse des Sciences et technologies de l’eau (Eawag). Tous les lacs, étangs, mares et étendues stagnantes peuvent être affectés, plus rarement les rivières et autres ruisseaux aux eaux plus mouvementées.
Quant aux lacs de montagne, ils sont épargnés par les algues bleues, au vu des températures plus fraîches à ces altitudes. C’est donc sur les points d’eau situés en plaine, en région périurbaine comme en campagne, pendant ou juste après des périodes de forte chaleur et d’ensoleillement, que la vigilance est de mise. Il faut aussi garder un œil sur la rive puisque le vent et les vagues peuvent y charrier des dépôts.
Bonne nouvelle toutefois: on repère facilement les efflorescences de cyanobactéries. L’eau est très trouble, bleu-vert, vert olive ou teintée de rouge, laissant parfois apparaître ce qui peut s’apparenter à des traînées d’écume ou des amas mousseux.
Jeunes enfants et chiens à surveiller
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit les niveaux de risque par rapport à la concentration de cyanobactéries dans l’eau. A la suite d’un contact, des symptômes légers tels que des irritations, des éruptions cutanées, des picotements des yeux voire des troubles gastrointestinaux peuvent apparaître. Une concentration plus forte et donc encore plus visible (dès 100 000 cellules par ml) peut conduire à des difficultés respiratoires ou des crampes musculaires. Et dès 10 millions de cellules par ml, on parle d’intoxication aiguë. Heureusement, peu de monde ressent l’envie de nager dans une mer d’écume rouge-vert…
En cas de contact avec des cyanobactéries, les adultes ont bien moins à craindre, au vu de leur masse corporelle, que les jeunes enfants, qui boivent aussi plus facilement la tasse. Les chiens sont particulièrement vulnérables: ils avalent de grandes quantités d’eau et sont intrigués par le goût bizarre des algues bleues. La direction zurichoise de la santé prévient: chez les chiens, des symptômes violents comme des convulsions ou une paralysie peuvent apparaître en quelques minutes, puis entraîner la mort. Il convient donc de redoubler de vigilance. Un examen rapide de l’eau du lac n’empêche pas de profiter de l’été!
Gilles D’Andrès
Nos conseils
Le niveau de prudence à adopter vis-à-vis des cyanobactéries dépend bien sûr des conditions. S’installer sur une grève sauvage au bord d’un étang en compagnie de ses enfants, ou entre adultes sur la plage publique très fréquentée d’un lac, ne requiert pas le même degré de vigilance. Voici les points à observer pour éviter les mauvaises surprises:
- Ne pas se baigner dans des eaux très troubles, vertes ou rouges, et rester éloigné des traînées d’écume et substances visqueuses en surface comme les tapis de mousse ou d’algues. Renoncer à la baignade si, dans l’eau jusqu’au genou, on ne peut pas voir ses pieds. Eviter aussi les zones où l’eau sent mauvais (odeur de vase, de moisi).
- En cas de doute sur la présence de cyanobactéries après une baignade, se laver au plus vite et soigneusement avec de l’eau et du savon, puis bien se sécher. Enlever et laver sans tarder les maillots de bain mouillés.
- Empêcher les jeunes enfants de boire l’eau du lac et de porter à la bouche des galets de plage, du sable, des algues ou d’autres matières visqueuses.
- Tenir son chien à l’écart des eaux troubles ou colorées, ne pas le laisser jouer, mâcher et manger des algues et de la mousse dans l’eau ou sur la rive. Si on pense qu’il est entré en contact avec des algues bleues toxiques, l’empêcher de lécher ses pattes ou son pelage. Laver intensément celui-ci dès que possible à l’eau claire.
- Rester attentif aux appels et prescriptions des autorités cantonales avant, pendant et après les vagues de chaleur. Ne pas se baigner dans les zones déconseillées.
- En cas de symptômes d’intoxication, appeler Tox Info Suisse au numéro 145, un médecin ou un vétérinaire.
Écrit en se fondant sur les recommandations de l’Eawag et des cantons de Fribourg, Neuchâtel, Vaud et Zurich.