On connaît l’action bénéfique du froid depuis longtemps. Traitement à la mode, la cryothérapie consiste à exposer son corps à une température extrême entre -110 oC et -160 oC durant deux à trois minutes afin de stimuler son organisme. Ce choc thermique brutal dilate les vaisseaux, permet à l’oxygène de mieux circuler dans le sang et déclenche des mécanismes antalgiques et anti-inflammatoires. Il stimule également la production d’endorphines qui font office d'antidouleurs naturels et de la sérotonine qui débarrasse du stress et de l'anxiété.
Faciliter la récupération sportive, soulager les douleurs chroniques, lutter contre le stress, améliorer la qualité de la peau ou du sommeil: les bienfaits qu’on prête à la cryothérapie sont innombrables. Prisé par les sportifs d’élite, l’exercice a tendance à se démocratiser.
Pas un remède miracle
La cryothérapie n’est toutefois «pas un remède miracle», souligne Tai Ly, fondateur du Centre AbsolutelyZen à Renens (VD). Si elle accompagne les traitements ordinaires, elle ne peut s’y substituer. «Nous ne prétendons pas guérir les maladies, mais nous pouvons contribuer à réduire les symptômes», abonde dans son sens Stéphane Rolle, directeur de la société Hibernatus, qui comprend une douzaine de centres en Suisse. Dans les meilleurs des cas, des clients réduisent leur prise de médicaments, comme les anti-inflammatoires et les antidouleurs, en accord avec leur médecin, détaille-t-il.
Il existe deux principaux types de cryothérapie. Le cryosauna (ou corps partiel) se présente sous la forme d’un caisson cylindrique refroidi par évaporation d’azote liquide. Seule la tête dépasse, le reste du corps étant immergé, alors que les pieds et les mains sont protégés. La méthode corps entier consiste pour sa part à exposer le corps en intégralité dans une chambre hermétique, sorte de congélateur géant. Pieds, mains, nez, bouche et oreilles y sont couverts.
Gare à l’amateurisme!
La cryothérapie ne convient pas à tout le monde. Si la pratique est relativement sûre, il existe des contre-indications, principalement pour les personnes cardiaques, souffrant d’hypertension, les femmes enceintes ou les intolérants au froid. Les clients doivent remplir une fiche médicale en arrivant dans un centre. En cas de contre-indication, un avis médical est demandé. A l’instar de la France, la pratique n’est pas réglementée en Suisse. Dans un rapport récent, l’Institut national français de la santé et de la recherche médicale (Insermpointe du doigt des problèmes de sécurité et un encadrement déficient.
Comme le relève Stéphane Rolle, l’accompagnement est obligatoire du début jusqu’à la fin de la séance et les coachs font l’objet d’une formation. C’est d’ailleurs la principale mesure de précaution: ne jamais entrer dans une cabine sans supervision. Face au froid très sec, des brûlures peuvent survenir en cas d’effort trop récent ou après une épilation, mais celles-ci correspondent à des coups de soleil, assure-t-il. Certains cas graves, rares, sont toutefois rapportés par l’Inserm, pour qui la cryothérapie devrait être encadrée par les autorités de santé.
Manque de preuves scientifiques
Malgré l’essor de la cryothérapie, son efficacité n’a pas été prouvée. Les résultats en faveur d’un effet positif sont modestes et uniquement à très court terme, conclut l’Inserm. Si cette technique a ouvert des pistes prometteuses, on se base plus sur des constats cliniques que véritablement scientifiques, relève Vincent Chollet, médecin du sport à la clinique Bois-Cerf à Lausanne. Les études sont difficiles à mettre sur pied et coûtent très cher. Elles concluent toutes sur la nécessité de poursuivre les recherches. «Nous n’avons pas encore assez de recul pour comprendre comment cela fonctionne. C’est une thérapie nouvelle», reconnaît Tai Ly.
Alexandre Beuchat
Un traitement coûteux
Un frein au développement de la thérapie par le froid est son coût. Les séances sont facturées entre 40 fr. et 50 fr. et doivent être répétées régulièrement. Plusieurs centres offrent néanmoins la première séance. Différents types d’abonnements sont proposés pour faire baisser le prix moyen de la séance. Certains clients atteints par exemple de fibromyalgie ou de sclérose en plaques optent pour un abonnement annuel illimité. Le hic, c’est que la pratique n’est, pour l’heure, pas reconnue par les assurances. «Les caisses maladie pourraient prendre en charge dans leurs complémentaires une partie du coût d’un certain nombre de séances», espère le directeur d’Hibernatus, Stéphane Rolle. Des discussions sont en cours.
Vu l’investissement élevé qu’elle implique (encadrement, machines, etc.), la cryothérapie constitue plutôt une activité complémentaire pour les préparateurs sportifs, les centres thérapeutiques paramédicaux ou les physiothérapeutes. Les chambres de cryothérapie devraient continuer à se développer, à en croire les acteurs de la branche. Stéphane Rolle a calculé qu’une cabine se justifie pour une population de 5000 à 10 000 habitants. Reste que comme c’est un traitement très court, les gens sont moins enclins à se déplacer. «Nous sommes dans un service de grande proximité», fait-il remarquer.