Que signifie exactement une estimation d’honoraires? C’est la question que l’on peut se poser à la lecture d’un tel document qu’une clinique dentaire vaudoise a remise à une lectrice de Bon à Savoir pour un traitement de 424.70 fr.
Sur ce dernier, il est stipulé que «l’estimation d’honoraires signée vaut reconnaissance de dette au sens de l’article 82LP». Cet article de la Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite précise notamment que «le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire». Si la formule contenue dans le document n’a aucune valeur légale, parce que le juge de la main levée doit vérifier lui-même que les conditions sont remplies, on peut néanmoins se demander ce qu’implique réellement un tel document une fois signé? Doit-il être considéré comme un contrat dont le montant engage à la fois la clinique et le patient ou un simple devis?
Le Tribunal cantonal valaisan avait considéré, en 2009, dans un cas très proche que l’estimation d’honoraires concernée représentait plus qu’un simple devis: «Il s’agit en réalité d’un contrat qui prévoit précisément les soins à fournir ainsi que les modalités de paiement des honoraires, partiellement par acompte». Ces précisions figurent également sur le document envoyé par notre lectrice. S’il s’agit bien d’un contrat, il engage les deux parties. Le patient a certes la possibilité de l’annuler, mais la clinique peut alors exiger des dédommagements. De son côté, cette dernière est liée par le montant indiqué, qu’elle ne peut dépasser, sauf si des éléments imprévisibles le justifient au cours du traitement. Si le document doit être considéré comme un simple devis, le montant signalé peut être dépassé dans un pourcentage raisonnable, par exemple jusqu’à 20%.
Ce que le client doit savoir, c’est que si le traitement n’a pas été effectué et qu’il est mis aux poursuites, il a tout intérêt à écrire au juge de la main-levée pour lui signaler la situation. Le créancier doit en effet prouver alors que la prestation a été effectuée, faute de quoi il n’obtiendra pas la main levée. Attention toutefois, quand l’une ou l’autre des parties n’obtient pas gain de cause pendant la main levée, elle peut malgré tout ouvrir ensuite une procédure ordinaire.
La question qui se posera alors est de savoir si le jeu en vaut la chandelle. Le montant est ici de 424.70 fr. Les frais de procédure ordinaire et d’avocat seront de toute évidence bien supérieurs. Notre lectrice, quant à elle, n’a pas signé l’estimation d’honoraires. Elle s’est adressée à une autre clinique où le traitement a été effectué deux jours plus tard pour un montant de… 168.30 fr.
Sébastien Sautebin